Selon Nicolas Portas, l’outil de commande publique Agrilocal « remet du lien social sur le territoire »

Un outil numérique national né dans le Puy-de-Dôme, une aide à l’achat de proximité pour la restauration collective, une valorisation de l’agriculture responsable : voici Agrilocal, présentée par son directeur.


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Pourquoi cet article ?

Nous pouvons être fiers de pas mal de choses en Auvergne, mais sans doute ne vous doutiez-vous pas que le Puy-de-Dôme était à l’initiative d’un des principaux outils dédiés à la restauration collective en France ?

Et ce n’est pas neutre : la plateforme Agrilocal, née en 2012 à l’initiative du Conseil Départemental du Puy-de-Dôme, a essaimé dans 37 départements et permet à de très nombreux acheteurs publics en restauration collective de s’approvisionner facilement en produits locaux de qualité et respectueux de l’environnement.

J’avais connu et travaillé avec Nicolas Portas quand j’étais au sein du groupe Centre-France La Montagne, en lien avec un projet portant sur les « communautés numériques« . L’angle de l’agriculture de proximité était déjà une piste prometteuse pour rapprocher des acteurs du territoire – c’était en 2013-2014.

Depuis, l’outil initié par Nicolas a fait du chemin, et comme son engagement en faveur de la résilience alimentaire locale et de la transition écologique en est une valeur forte, il m’a semblé pertinent de l’évoquer dans ces colonnes.

Damien

Les principaux points à retenir

  1. Agrilocal est d’abord une plateforme numérique, initiée par Nicolas Portas (son directeur actuel) au sein du département du Puy-de-Dôme. Elle vise à faciliter la commande publique par les acteurs de la restauration collective – collèges, lycées, écoles, EHPAD, hôpitaux … – en direction des producteurs alimentaires locaux sous labels de qualité (notamment bio).
  2. Agrilocal est aussi une association loi 1901 d’envergure nationale qui « porte » l’outil numérique, en assurant la maintenance et le développement, mais aussi le déploiement dans les départements adhérents et l’animation – communication, événementiel, formation d’animateurs locaux. 37 départements en sont adhérents à début 2021, pour un budget annuel de 450 000 € et 900 000 € de C.A.
  3. La question de l’animation de filière agricole y est capitale. Via de nombreux partenariats, les équipes Agrilocal sensibilisent peu à peu les acheteurs publics – mais aussi les producteurs – à l’utilisation de la plateforme et à l’adaptation des pratiques qui en découle. Les avantages sont : un processus de commande facilité (et respectant les contraintes administratives), une meilleure connaissance du marché de proximité, des contrats à long terme et de la trésorerie pour les agriculteurs.
  4. La réponse des acteurs de la commande publique est généralement bonne, hormis dans l’Education Nationale où la multiplicité des interlocuteurs (collèges, lycées notamment) et certaines habitudes anciennes solidement ancrées rendent les efforts de sensibilisation parfois difficiles.
  5. Suivant la loi Egalim, Agrilocal favorise de fait les « labels de qualité » pour la production alimentaire locale – AOP, bio … Ainsi, les producteurs sont orientés vers ces choix qui se veulent plus respectueux de l’environnement. D’une manière générale, Agrilocal souhaite participer à l’évolution du monde agricole hors du productivisme et vers une logique plus durable, respectueuse de l’environnement et valorisant le lien social de proximité.
  6. Agrilocal est donc un bon outil pour développer la résilience alimentaire locale, puisqu’il tisse des liens de proximité acheteur-producteur. Dans le Puy-de-Dôme, il a ainsi permis de consolider plusieurs filières alimentaires – l’autonomie en production carnée ou laitière y étant assurée. C’est plus délicat pour les productions de fruits et de légumes, mais pas forcément illusoire si des bonnes décisions sont prises – notamment dans le cadre du PAT du Grand Clermont.

L’intervenant : Nicolas Portas

Directeur de l’association nationale Agrilocal, et initiateur du projet. Responsable du service agriculture et forêts au Conseil Départemental du Puy-de-Dôme.


Originaire des Combrailles, de formation ingénieur agronome, Nicolas est entré en 2006 au Conseil Départemental du Puy-de-Dôme. Il était alors chargé de mission forêts-bois-énergie, avec pour objectif la mise en place de la politique forestière départementale – développement de la filière, proposition de mesures d’accompagnement en termes de développement économique et de maintien des emplois en zone rurale. « J’avais participé à créer l’association des communes forestières du département » , précise-t-il.

En 2008, il devient responsable du service agriculture et forêts. « On voulait accompagner la diversification et la transformation des exploitations, avec une politique d’accompagnement technique et financier. » . Travaillant notamment sur la sensibilisation des acheteurs publics à l’alimentation de proximité, il commande en 2011 une étude « état des lieux » qui le poussera à monter – en partenariat avec le département de la Drôme – la plateforme numérique Agrilocal.

Aujourd’hui, en parallèle de son poste au Conseil Départemental du Puy-de-Dôme, il est directeur de l’association nationale Agrilocal qui compte 37 départements membres.

Contacter Nicolas par e-mail : nicolas.portas@puy-de-dome.fr
Contacter Nicolas par téléphone : 06 03 59 57 91

La structure : association Agrilocal

Association nationale opérant la plateforme numérique Agrilocal, dédiée aux acheteurs publics de la restauration collective et facilitant l’achat auprès de producteurs locaux.


L’association Agrilocal est née de la volonté d’industrialiser, au niveau national, le prototype de plateforme numérique d’achat pour la restauration collective publique Agrilocal – initié en 2012 par le département du Puy-de-Dôme et le département de la Drôme.

Aujourd’hui, l’association gère l’outil numérique Agrilocal – hébergement, développement technique et adaptations, maintenance … mais aussi l’animation du réseau (37 départements en sont adhérents) et l’accompagnement des nouveaux entrants, via la formation d’animateurs locaux. Enfin, il y a un plan de communication au niveau national, avec notamment l’édition d’une revue destinée aux utilisateurs (départements, acheteurs, producteurs) et l’organisation d’un séminaire annuel couronné par des Trophées.

Selon Nicolas Portas, son directeur, la plateforme Agrilocal est « outil simple d’utilisation pour les acheteurs mais respectant les règles d’exigence de la commande publique, et avec un accès facile pour les producteurs. » . Mais, au-delà de l’outil, elle permettrait – toujours selon lui – d’aider notamment les jeunes agriculteurs à gagner rapidement en visibilité, tout en leur apportant une contractualisation à terme et des apports en trésorerie.

Sociétalement, Agrilocal valorise « un modèle (…) durable, plus collectif et plus partenarial« , et « remet du lien social sur les territoires » en rapprochant acheteurs et producteurs.

Le budget de l’association est d’environ 450 000 € par an, pour un chiffre d’affaires de 900 000 € en 2020, en croissance constante. Sur le Puy-de-Dôme, à titre d’exemple, Agrilocal représente 220 acheteurs publics, 320 producteurs référencés (dont des associations comme Auvergne Bio) pour 840 tonnes de produits alimentaires échangés – depuis le lancement de la plateforme.

Voir le site web de l’association Agrilocal


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D’où est partie l’initiative Agrilocal ?

A partir de 2008, au Conseil Départemental du Puy-de-Dôme, j’étais en charge de la question générale de l’agriculture et de la forêt. On voulait alors accompagner la diversification et la transformation des exploitations, sur les aspects techniques et financiers. En parallèle, on incitait les collèges à travailler sur de l’approvisionnement local pour des repas biologiques.

J’ai alors engagé, en 2011, un état des lieux sur les pratiques de restauration des collèges pour mettre en lumière les freins, avantages et inconvénients [de l’achat de produits locaux], et voir comment rapprocher l’offre et la demande. L’objectif était aussi que les producteurs qu’on accompagne soient rapidement en lien avec la restauration collective.

L’étude à l’origine du projet Agrilocal avait montré une profonde méconnaissance du marché alimentaire local par les acteurs de la commande publique / Crédit photo : Romain DEL BUONO de Pixabay

Quels constats as-tu alors tiré de cette étude ?

Les conclusions de l’époque étaient qu’il y avait une totale méconnaissance des acteurs publics de la restauration collective sur l’offre locale. Il fallait donc y remédier, et arriver à lever des freins et des préjugés de ces acheteurs : [selon eux, acheter local équivalait à] pas d’offre, pas de volume, des prix inaccessibles, et trop de contraintes juridiques liées à la commande publique.

Il y avait une totale méconnaissance des acteurs publics de la restauration collective sur l’offre locale.

On a donc voulu mettre en exergue l’offre locale, insuffisamment connue. Mais aussi montrer, par une analyse économique et financière, que les prix des producteurs locaux pouvaient être aussi  – voire plus – compétitifs que ceux des fournisseurs industriels ! 

Pourquoi être parti sur un outil numérique pour répondre à ces attentes ?

En 2012, nous avons développé la plateforme numérique Agrilocal, en partenariat avec le département de la Drôme. Il nous fallait en effet rapprocher offre et demande, avec un outil simple d’utilisation pour les acheteurs mais respectant les règles d’exigence de la commande publique, et avec un accès facile pour les producteurs. Il n’y a pas eu débat sur [la meilleure solution : une application web] !

Exemple d’interface de l’outil numérique Agrilocal (ici extraite du tutoriel). Un autre écran permet de suivre l’avancement de sa commande / Crédit visuel : Agrilocal (DR)

Le prototype a donc été testé sur les deux territoires. On a communiqué sur les résultats, et d’autres départements s’y sont intéressés assez vite. En 2013, nous avons finalement créé l’association Agrilocal, permettant de passer à une industrialisation du logiciel au niveau national. 

Comment fonctionne Agrilocal aujourd’hui ?

De nombreuses fonctions sont désormais automatisées. Au départ, on était sur des marchés de gré-à-gré, maintenant il s’agit surtout de marchés planifiés, via des accords-cadre avec marchés à bons de commandes … L’outil est en constante évolution en fonction de la réglementation qui change très vite, et bien sûr de la technologie

L’association s’occupe de la maintenance de l’outil, mais nous pouvons accompagner tous les départements qui souhaitent nous rejoindre – n’oublions pas qu’Agrilocal est un service public. Le budget annuel de l’association est de l’ordre de 450 000 €, principalement consacré au développement informatique, à la gestion des plateformes et à la mise en œuvre d’un plan de communication national. Il y a aussi un bloc accompagnement et formation des animateurs locaux.

Tu évoques la question de l’animation. En quoi consiste-t-elle ?

L’outil Agrilocal reste … un outil. Si on ne l’anime pas, si on ne sensibilise pas, si on n’accompagne pas les utilisateurs de manière quasi-personnalisée, ça ne marchera pas. Chaque département qui adhère s’engage à développer des moyens d’animation pour accompagner les acheteurs publics dans la restauration collective : collèges, lycées, maisons de retraites, cantines scolaires … 

Nous pouvons accompagner tous les départements qui souhaitent nous rejoindre.

Côté producteurs, c’est une démarche partenariale où les chambres consulaires, autant que les associations de producteurs, travaillent ensemble pour animer la filière et s’acclimater à ce nouveau type de débouchés. Car on ne vend pas de la même façon sur Agrilocal auprès de la restauration collective, en mode marché public, que lorsqu’on vend à la ferme. Il faut notamment adapter la mercuriale de prix en fonction des volumes contractualisés.

L’équipe de restauration de l’EHPAD Résidence La Valoine, Feytiat en Haute-Vienne, lauréats 2020 (avec 7 autres candidats) du concours annuel Agrilocal. Relayés dans le magazine du réseau, c’est un exemple d’animation et de sensibilisation des acheteurs / Crédit photo : Agrilocal (DR)

Les acheteurs publics répondent-ils bien à cette dynamique ? 

C’est assez variable : par exemple, on arrive à bien fédérer les cantines scolaires car c’est très “descendant” – il faut convaincre le maire ou son adjoint dédié. Sur les collèges ou les lycées, les collectivités ont la compétence mais ne sont pas décideuses des actes de commande, qui reviennent à l’Etat. Les chefs de cuisine – dans les collèges, qui sont liés au Conseil Départemental – sont là pour exécuter mais ne décident pas ! 

Si on ne sensibilise pas, si on n’accompagne pas les utilisateurs de manière quasi-personnalisée, ça ne marchera pas.

Il y a donc, dans ces établissements,  un triptyque en termes de sensibilisation : le principal, qui est le donneur d’ordres, le gestionnaire, qui est responsable des commandes – tous deux personnels de l’Etat – et les équipes de cuisine qui prépareront les repas. Il faut considérer ces trois types d’acteurs quand on veut les emmener vers des pratiques locales vertueuses. (…) 

D’autres administrations réagissent bien : au niveau du Ministère des Armées, les économats ont des obligations d’achat sur Agrilocal quand la plateforme est disponible. De même, le Ministère des Affaires Sociales a fait passer des éléments de communication [qui nous sont favorables] auprès de ses établissements. Nous espérons que le Ministère de l’Education Nationale en fera de même.

Lire l’entretien : l’expérience anglaise de résilience alimentaire, selon Alizée Marceau

Mais la loi favorise-t-elle un outil comme Agrilocal ?

En fait, l’intégration du localisme dans les règles européennes de la commande publique est interdite. On peut néanmoins travailler dans le cadre de la loi Egalim pour favoriser les produits sous signe officiel de qualité – AOP, bio … Le débat sera alors s’il vaut mieux introduire des produits locaux non bio, ou des produits bio mais pouvant provenir du monde entier.

L’intégration du localisme dans les règles européennes de la commande publique est interdite.

Au-delà, il y a des objectifs fixés dans cette loi. Il s’agit d’avoir 50% de produits en restauration collective sous “signe officiel de qualité”, dont 20% de produits bio. Mais pas de contrainte ni de décret d’application … et pas de notion de local. La loi Egalim va cependant dans le bon sens pour sensibiliser les acteurs de la restauration collective et la plate-forme Agrilocal permet de favoriser cette notion de proximité.

Neuf ans après le lancement de la plateforme, quels en sont les résultats ?

Au niveau du Puy-de-Dôme, nous comptons sur Agrilocal 221 acheteurs publics, dont 50 collèges (sur 58), 16 lycées, 59 communes, 41 maisons de retraites, 5 hôpitaux … et l’outil a été ouvert depuis 2020 pour les structures de l’aide alimentaire. 

Du côté des fournisseurs, il y a 321 références, essentiellement des producteurs locaux, sur toutes les gammes de produits – même si on a davantage de production fromagère ou carnée. On a aussi une quarantaine d’artisans locaux, comme des bouchers ou des boulangers. 

Enfin, on a une vingtaine d’entreprises locales, souvent de transformation, mais gérées par les producteurs. Auvergne Bio Distribution, qui est une SCIC, en fait partie – c’est un regroupement de producteurs qui ont mutualisé leurs moyens et leurs efforts.

Cartographie des producteurs inscrits dans la base Agrilocal du département. La variété des produits référencés est importante, et le territoire est globalement bien couvert / Crédit visuel : Agrilocal (DR)

Et en termes de volumes de produits ?

Cela représente 840 tonnes depuis 2012, dont 346 de viande et 142 de légumes, plus d’un million de yaourts, 36 t de fruits, 4 t d’oeufs … soit un C.A. de 4,2 M d’euros. Chaque année cela progresse, le C.A. annuel s’approchant de 900 000 € dernièrement.

Du côté des agriculteurs, quels sont les effets positifs ?

Agrilocal a permis notamment à des jeunes agriculteurs de se faire rapidement connaître : quand ils vendent leurs productions à de la restauration scolaire, ça alimente le bouche-à-oreille puisque les enfants influencent toujours les parents. Globalement, on estime que cela représente 20% de leur C.A. au démarrage. 

L’outil leur apporte aussi une contractualisation rapide, et une assurance de paiement (échéances à 30 jours) donc des rentrées de trésorerie permettant de développer les autres circuits de commercialisation. 

Agrilocal apporte aux jeunes agriculteurs une contractualisation rapide, et une assurance de paiement.

On ne souhaite cependant pas que les producteurs soient à 100% dédiés à la restauration collective ! La diversification des débouchés est capitale, simplement pour ne pas être dépendants d’un seul marché.

Quelle visibilité le système apporte-t-il aux producteurs ?

Agrilocal est basé sur un système d’accord-cadres à bons de commande, à 3 mois, 6 mois, un an … selon la saisonnalité de la production. Sur les yaourts par exemple, c’est plutôt facile et on est sur des marchés annuels. Sur la viande, on fonctionne par semestre, afin de tenir compte de l’évolution des coûts. On tient ainsi compte des contraintes de production et de la variabilité des prix, pour que le producteur soit toujours gagnant. 

Viande, oeufs, légumes, yaourts … chaque produit a sa saisonnalité propre, et fait l’objet d’un type précis de contrat-cadre / Crédit photo : M. Lepeytre, Chambre d’Agriculture de la Creuse (DR)

Pour les fruits et légumes, où le département n’est pas autonome, la majorité des producteurs ont déjà des débouchés rémunérateurs. Et, dans ce cas, la restauration collective n’est pas intéressante. Mais, si on veut monter en puissance, il faut structurer une filière et encourager l’installation de nouveaux producteurs. 

On sera alors sur du ponctuel avec eux, avec des volumes d’achats importants sur un temps court. Mais si le débouché est très proche, géographiquement, ça devient intéressant : un maraîcher aura intérêt à livrer massivement l’école du village plutôt que d’aller passer du temps sur un marché.

Quel est l’état de la filière fruits et légumes dans le département ?

Elle n’est pas assez structurée pour répondre aux attentes de gros collèges, de gros hôpitaux, notamment en zone urbaine. C’est pourquoi, en termes de tonnages, on a peu de volumes contractualisés sur les légumes sauf pommes de terre et carottes. Sur les fruits, cela fonctionnera sur des pommes, et un peu de fraises et de cerises, mais de manière partielle.

Lire l’entretien : pour Lucie Vorilhon, « c’est très dur de trouver des maraîchers en local »

Justement, comment développer les filières agricoles sous-dimensionnées pour répondre à la demande ?

Je pense qu’Agrilocal doit se positionner au cœur des politiques agricoles départementales. Les mesures d’accompagnement des agriculteurs sont absolument nécessaires : installations, cultures alternatives … mais la balle est dans le camp des politiques, pour mettre en place des actions qui favoriseront la préservation du foncier ou encore l’expérimentation de nouvelles productions, par rapport au changement climatique.

Sur le département du Puy-de-Dôme, on a ainsi tout un bloc d’animation foncière agricole pour encourager la réorganisation du parcellaire. Le but est de faciliter l’installation des nouvelles générations.

Les mesures d’accompagnement des agriculteurs sont absolument nécessaires, mais la balle est dans le camp des politiques.

On travaille aussi à reconquérir des espaces perdus par le phénomène de déprise – il s’agit de la conséquence de l’exode rural, avec l’abandon de parcelles en termes d’entretien qui a entraîné un reboisement naturel, par exemple dans le Livradois Forez. N’oublions pas que le foncier agricole reste la base pour s’installer et produire !

Colloque du réseau national Agrilocal en 2017 à Montpellier, en présence de Nicolas (à gauche sur la photo) et de Jean-Yves Gouttebel, président du Conseil Départemental du Puy-de-Dôme, qui prend la parole à ce moment / Crédit photo : Agrilocal (DR)

Tu évoquais la contrainte du changement climatique et de l’expérimentation …

Oui, car le Département encourage l’implantation de nouvelles cultures, en arboriculture notamment. Par exemple, suite à la fermeture de la Sucrerie de Bourdon, on a mis en place un contrat de filière avec les anciens betteraviers pour les encourager à planter des cultures alternatives, légumières, arboricoles, légumineuses à graines, etc. Cela encouragera la diversification. 

Lire l’entretien avec Olivier Tourand : « certaines cultures n’auront plus leur place »

On a aussi des partenariats avec Terres de Lien, ou encore Îlot Paysan, sur des projets bien spécifiques. Enfin, sur le péri-urbain, on sera plutôt sur l’enjeu de préservation de l’espace agricole, 

Les agriculteurs pourront-ils s’adapter à l’évolution du climat ?

L’objectif est de passer du modèle très productiviste à un modèle plus durable, plus collectif et plus partenarial. Le changement climatique nous pousse dans ce sens. Il y a 10 ans, la profession agricole, via ses syndicats majoritaires, était vent debout contre ces politiques … ce n’est plus le cas du tout aujourd’hui ! Les aléas climatiques, les crises économiques ont fait prendre conscience au monde agricole de l’intérêt de se diversifier, sur des modèles d’exploitation familiale et des échelles de proximité.

L’objectif est de passer du modèle très productiviste à un modèle plus durable, plus collectif et plus partenarial.

Les démarches PAT [Projet Alimentaire Territorial], qui se développent de plus en plus, vont dans le bon sens : elles permettent de faire prendre conscience. Dans le PAT du Grand Clermont, on chapeaute d’ailleurs l’animation du volet “restauration collective”, et on y travaille la dynamique.

D’ailleurs, en termes d’autonomie alimentaire, le territoire est déjà autonome sur les produits carnés et laitiers – en restauration collective, du moins. Sur les légumes et les fruits, c’est l’inverse, il y a tout à structurer. Mais l’autonomie locale en légumes n’est pas illusoire ! 

Lire l’entretien avec Jean-Pierre Buche : « le PAT veut montrer que la transition est possible »

Et dans quelle mesure Agrilocal participe-t-il à cette démarche de transition ?

L’outil Agrilocal est à destination des professionnels de la restauration collective. Mais ce qu’on fait va bien au-delà : notre objectif est de recréer du lien de proximité. Peu importe si la contractualisation se fait dans ou hors d’Agrilocal ! Le but est que les producteurs et acheteurs publics de la restauration collective se connaissent et arrivent à travailler ensemble. C’est du lien social que l’on remet sur le territoire.

Pour aller plus loin (lien complémentaire proposé par Nicolas) :
le site national d’Agrilocal, avec notamment des témoignages vidéo d’acteurs du réseau

Et, en bonus : le tableau de saisonnalité des fruits et légumes du Puy-de-Dôme.
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Propos recueillis le 22 février 2021, mis en forme pour plus de clarté puis relus et corrigé par Nicolas. Crédit photo de Une : Romain DEL BUONO de Pixabay