Fondateur de la Convention des Entreprises pour le Climat, Eric a réussi le pari fou de réunir 150 chefs d’entreprises autour de l’urgence environnementale, pour faire bouger les lignes.
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Et en Auvergne ? La Convention des Entreprises pour le Climat, portée par Eric Duverger, couvre le territoire national. En Auvergne, un projet similaire se met en place. Son principe : fédérer la communauté des acteurs économiques locaux engagés dans la transition écologique et la résilience territoriale. Pour recevoir les détails sur le projet et être tenu.e informé.e de son lancement, vous pouvez nous écrire une simple demande à l’adresse contact@sens9.fr |
Pourquoi cet article ?
Vous l’aurez remarqué, je m’entretiens la plupart du temps avec des représentants de collectivités – élus locaux de villes, de communautés de communes, de départements … mais la réponse aux enjeux du dérèglement environnemental n’est pas que entre les mains des élus et acteurs publics. La preuve avec cet incroyable pari, j’espère en passe d’être gagné (c’est encore un peu tôt mais à suivre) de la Convention des Entreprises pour le Climat.
Or, il se trouve que le fondateur de l’initiative, et président de l’association éponyme, habite … à Billom ! J’ai ainsi pu rencontrer Eric Duverger qui m’a résumé l’action portée par lui et les 70 bénévoles de son équipe associative. L’entretien ayant eu lieu fin septembre, il s’est basé principalement sur les résultats de la première session qui venait d’avoir lieu, mais l’essentiel des rencontres et des livrables reste bien sûr à réaliser d’ici l’été prochain.
Il sera intéressant de voir comment les participants “tiennent” dans la durée, car l’engagement en termes de temps n’est pas anodin pour des chefs d’entreprises. Egalement, quelle forme prendront les fameux livrables décrits dans l’entretien … et quels impacts ils auront, en particulier auprès du monde politique – le but affirmé par Eric étant de s’inspirer de la Convention Citoyenne pour le Climat en évitant les écueils qu’elle a pu rencontrer dans sa mise en application.
Damien
Les principaux points à retenir
- Après 20 ans passés au sein de Michelin et dans le monde des grandes entreprises, Eric était marqué par la faible compréhension, de la part de ces acteurs économiques, des enjeux environnementaux et de l’urgence du problème écologique. Pour lui, les objectifs à 2050, les “petits pas”, et l’auto-satisfecit qui en découlent sont contre-productifs.
- C’est pourquoi il cherche à provoquer un mouvement de masse auprès de ce qu’il estime être les 2000 entreprises françaises “pionnières” du changement sociétal et environnemental. Pour ce faire, il fait le pari qu’en mobilisant activement 150 d’entre elles à travers une année de rencontres, de formations et d’échanges, l’effet de levier pourra se produire. C’est le principe de la Convention des Entreprises pour le Climat qu’il a co-fondé.
- Fondamentalement, il vise à “reconfigurer le logiciel de pensée” des entreprises, en travaillant sur “tous les fronts” et en n’hésitant pas à provoquer une “dissonance cognitive” qui sera vecteur de réalignement. La première session de la Convention, du 9 au 11 septembre dernier, a notamment été le théâtre de certaines prises de conscience de la part de participants.
- Les profils de ces participants sont volontairement variés : tous types d’entreprises en termes de taille, de secteur d’activité, d’origine géographique sont représentés par leur dirigeants (DG, président …). L’intérêt est de mélanger, au sein de sous-groupes de travail de 15 personnes, ces profils. Au total, les participants représentent 500 000 salariés et 75 milliards de chiffres d’affaires. Beaucoup sont accompagnés de “planet champion“, un salarié dédié au sujet environnemental (comme le responsable RSE) et qui les aide à avancer.
- Eric mise sur de nombreux leviers pour motiver les entreprises à adhérer et à tenir sur la durée : la demande des salariés en quête de sens et d’utilité, l’engagement des équipes, l’image, la capacité de recrutement, la réponse à des problèmes constatés sur les ressources … ou tout simplement la conviction personnelle du dirigeant et sa volonté de “savoir quoi faire”.
- Les six sessions ont lieu dans différentes grandes villes françaises et ses résultats aboutiront en juin 2022. Les livrables sont ainsi de trois ordres : 150 “feuilles de route” rédigées par chaque entreprise participante sur sa manière de traiter l’urgence environnementale ; un livrable dédié aux décideurs politiques (30 rendez-vous préparatoires ont été assurés en amont) ; enfin, une évolution fondamentale de la culture d’entreprise afin de toucher les autres entreprises engagées, hors Convention. Pour cela, plusieurs partenaires comme l’ADEME, la Fresque du Climat ou le Shift Project seront mobilisés.
L’intervenant : Eric Duverger
Fondateur et président de la Convention des Entreprises pour le Climat ; cadre Michelin
Salarié Michelin depuis 1997 – dans la finance, le marketing et la stratégie – Eric a pris un congé sabbatique depuis 2020 (à son retour des USA) pour se dédier à la Convention des Entreprises pour le Climat. Il a fondé l’association qui porte l’initiative et en est le président.
Il est entièrement consacré à la Convention, participe très activement à la préparation et à l’animation des sessions ainsi qu’au recrutement des participants et partenaires, et à l’optimisation de l’impact des livrables que la Convention produira d’ici l’été.
Par ailleurs, il a suivi la Lab Session n°26 de l’Institut des Futurs Souhaitables.
Contacter Eric Duverger par courriel : eric [chez] cec-impact.org |
Crédit photo : éditeur
La structure : la Convention des Entreprises pour le Climat
Association regroupant 150 entreprises engagées face à l’urgence écologique et pour un impact politique et sociétal
La Convention des Entreprises pour le Climat se concrétise principalement par une année de séminaires, de formations et d’échanges – six sessions de deux jours chacune réparties sur l’année scolaire 2021-2022 – dédiées au monde de l’entreprise. Elle regroupe 150 dirigeants d’entreprises françaises très variées par leur profil, leur taille, leur origine géographique et leur secteur d’activité.
Le but de la Convention est de provoquer une forme d’effet de masse pour que les 150 participants, qui auront “pivoté” dans leurs pratiques et leur état d’esprit face au dérèglement environnemental, puissent entraîner le plus de “pionniers” possibles parmi les entreprises françaises. En cela, le pari est similaire à celui de la Convention Citoyenne pour le Climat, si ce n’est que les livrables, les partenaires et l’impact sur le monde politique auront été approchés différemment.
L’association regroupe environ 70 bénévoles. Elle a été co-fondée par Eric Duverger (président), Valérie Brunel, Armelle du Peloux, Yannick Servant et Louis Pinot.
Accès direct aux questions
- Tu as pris deux années sabbatiques pour lancer une initiative unique et de grande ampleur en direction du monde économique … Qu’est-ce qui a motivé ton engagement ?
- Y a-t-il donc un espoir que les grands groupes prennent conscience des enjeux ?
- Comment penses-tu entraîner avec toi ces décideurs ?
- Quels sont les profils de dirigeants que tu cibles dans la Convention ?
- Mais ces dirigeants ont-ils le temps de se consacrer à l’enjeu écologique, en sus de leur travail quotidien ?
- Comment se déroule une session de la Convention ?
- Et comment ont réagi les participants à cette session d’impulsion ?
- Les chefs d’entreprises ne sont-ils pas enclins à miser plutôt sur la “croissance verte” ?
- Selon toi, qu’est-ce qui motive les entrepreneurs à adhérer à la Convention ?
- Tu t’es inspiré de la Convention Citoyenne pour le Climat [CCC], mise en place par le président Macron mais qui n’a pas eu l’impact espéré. Quelles leçons en as-tu tirées ?
- Et quelles actions as-tu entreprises pour t’assurer de cet impact politique ?
- Un mot sur les livrables de la Convention …
- Es-tu soutenu par des acteurs publics dans ta démarche ?
- Y a-t-il une logique de territoire dans l’approche que tu proposes aux participants ?
- Pour conclure, quelle notion-clé les participants doivent-ils emporter de la Convention ?
Pas assez de neige, pas assez d’eau, trop de chaleur… comment les acteurs touristiques locaux s’adaptent-ils aux conséquences du dérèglement climatique ?
Rencontre Tikographie du lundi 2 décembre à 17h (librairie des Volcans) – tous publics, accès libre !
Tu as pris deux années sabbatiques pour lancer une initiative unique et de grande ampleur en direction du monde économique … Qu’est-ce qui a motivé ton engagement ?
Il me semble que les dirigeants d’entreprises n’ont pas conscience de l’urgence écologique ! Pour moi, s’il n’y a pas de bascule concrète d’ici cinq ans afin de produire des effets positifs sous dix ans, on sera tous pris de court par la catastrophe environnementale. Or, beaucoup de grands groupes ont des objectifs à 2050 : c’est bien trop tard.
En fait, je ressens souvent une forme d'”insincérité” entre les discours officiels très volontaristes de certains dirigeants et la traduction réelle dans leurs politiques d’entreprises.
Le pire pour moi, c’est lorsque les dirigeants se donnent des auto-satisfecit, alors que toutes les courbes de gaz à effet de serre sont à la hausse et que le déclin de la biodiversité ne fait qu’accélérer. La “politique des petits pas” est loin d’être suffisante, elle est même contre-productive : on a l’impression qu’on bouge, alors qu’à l’échelle de ce qui serait nécessaire, on fait du sur-place.
Y a-t-il donc un espoir que les grands groupes prennent conscience des enjeux ?
Je crois que les grands groupes seront les derniers à bouger à la hauteur des enjeux : une communication très léchée, mais trop d’inertie dans le système et trop de forces qui tirent en arrière, comme les boards et les actionnaires. Conséquence : ils risquent de se contenter encore longtemps d’une politique de RSE classique.
Inspirer une nouvelle normalité et provoquer un changement culturel.
Comme il ne reste plus beaucoup de temps pour opérer une véritable bascule sociétale, il convient de cibler les “zones de pouvoir”, économique et politique. Puisque les grands groupes sont encore réfractaires, visons les 2000 entreprises françaises que l’on peut considérer comme pionnières du changement écologique et sociétal, parce que leurs dirigeants sentent que le status quo n’est plus possible. Et qu’ils veulent agir, maintenant.
Si nous y parvenons, nous aurons atteint une masse critique qui peut vraiment changer les choses : inspirer une nouvelle normalité et provoquer un changement culturel.
Comment penses-tu entraîner avec toi ces décideurs ?
Face à l’inertie du système, essayons de faire comme au judo : utiliser l’énergie de son partenaire. Si on mène une attaque frontale – comme le font certaines associations type Extinction Rebellion – j’ai peur que cela braque tout le monde et qu’au final rien ne bouge.
La clé est de parler une langue que les décideurs comprennent et de proposer une dynamique collective qui les motive. Chemin faisant, nous nous mettons en position de faire bouger les lignes en profondeur.
Ma conviction est qu’il faut “reconfigurer le logiciel de pensée” de ces entreprises. Réaligner leur énergie intérieure avec les enjeux écologiques. Pour cela, il faut travailler sur tous les fronts : envies, valeurs, missions, indicateurs de réussite … Et surtout, provoquer la dissonance cognitive, cette prise de conscience que l’action qu’ils ont menée jusqu’à présent ne cadre pas avec ce qu’il faut faire pour éviter la catastrophe. Lorsque cette dissonance fait son chemin dans la conscience, elle se traduit immanquablement par un réalignement, lequel est vecteur d’une grande énergie.
Quels sont les profils de dirigeants que tu cibles dans la Convention ?
Ce sont des dirigeants décisionnaires : directeurs généraux la plupart du temps, membres de conseils d’administration … parfois le président de la structure. La clé est, au-delà de l’engagement de “12 jours de travail pour la planète” (répartis en 6 séminaires sur 8 mois), qu’ils soient prêts à remettre en question les modèles d’affaires de leur entreprise.
Ma conviction est qu’il faut reconfigurer le logiciel de pensée de ces entreprises.
Concrètement, parmi les 150 membres, nous avons une grande variété de profils : beaucoup de femmes, des jeunes, des personnes issues de la “diversité” culturelle. Il y a aussi une grande diversité de structure : cela va de start-uppeurs aux PDGs d’Heineken France ou Renault Trucks. Nous avons accueilli toutes les tailles et tous les secteurs d’entreprises, représentant au total 75 milliards d’euros de chiffre d’affaires et 500 000 salariés partout en France.
Durant les sessions, ils forment des sous-groupes de quinze, mélangeant tous ces profils. Nous emmenons tout ce petit monde à travers la France, d’abord à Paris, puis à Lille, Nantes, Lyon, Marseille, puis nous serons de retour à Paris au printemps 2022.
Mais ces dirigeants ont-ils le temps de se consacrer à l’enjeu écologique, en sus de leur travail quotidien ?
Cela dépend de leur organisation mais surtout des priorités qu’ils assignent à leur agenda … Pour les aider, nous faisons en sorte qu’ils disposent d’un planet champion au sein de leur entreprise : il s’agit d’un “accompagnateur du changement”, un collaborateur dédié aux sujets environnementaux tels qu’un directeur RSE ou développement durable.
Souvent, ces profils sont plus avancés sur les enjeux écologiques, et veulent faire bouger leur direction. Ce seront eux qui vont faire les “sherpas” entre les séminaires, et travailler sur les livrables et la stratégie de leur entreprise. A mon sens, c’est une très bonne configuration pour faire bouger les choses.
Comment se déroule une session de la Convention ?
Nous avons démarré début septembre ! Lors des journées inaugurales, nous avons commencé par secouer tout le monde en présentant des données brutes sur le changement climatique et environnemental : chiffres du GIEC, du Shift Project, de l’Office de la biodiversité… mais aussi en parlant du ressenti de chacun face à la dégradation constatée.
Nous avons délibérément décidé d’aborder aussi le champ de l’émotion : par exemple, les matins, un temps de “centrage” était organisé. Cela a pu paraître disruptif pour certains participants… mais cela fait partie de la prise de conscience nécessaire.
Nous avons délibérément décidé d’aborder le champ de l’émotion
Enfin, des groupes de travail de 15 membres ont été constitués. Ils seront accompagnés tout au long de la convention par un duo, un coach et un facilitateur. C’est dans ces groupes que le travail en profondeur est réalisé et l’intelligence collective activée.
Et comment ont réagi les participants à cette session d’impulsion ?
Nous avons reçu de très nombreux témoignages à la fois sous le choc du constat climatique et enthousiastes pour chercher des solutions. La satisfaction globale nous a confortés : 9.2 sur 10 alors que pourtant, c’était extrêmement intense – début à 8h du matin pour tout le monde, 15 minutes pour manger …
Durant cette première session, plusieurs participants ont ressenti une émotion très forte. Je me souviens d’une dirigeante qui a pleuré après la journée sur les “limites planétaires” : elle avait brutalement pris conscience du dilemme de son activité, qui est aujourd’hui fortement polluante et énergivore. Mais, en même temps, son entreprise est une entreprise familiale, elle est responsable de ses salariés … que peut-elle faire ?
Nous assumons la volonté de “secouer” les participants dès le début. Comme le résume Loïc Stephan, qui a travaillé avec Pablo Servigne sur la notion d’effondrement, “ça ne peut pas continuer ainsi, mais on ne sait pas ce qu’il va se passer.” Dans la foulée Mathieu Baudin, prospectiviste à l’Institut des Futurs Souhaitables, est venu nous dire “c’est la fin d’un monde, pas la fin du monde“.
Nous assumons la volonté de “secouer” les participants dès le début.
Parfois, certains acteurs sont déjà sensibilisés à ces enjeux. Il leur faut alors une sorte de passage à l’échelle, comme avec Miimosa, un dispositif de financement participatif pour l’agro-écologie. Dans d’autres cas, nous pourrions assister à des “renoncements” avec des dirigeants qui vont complètement changer de direction.
Les chefs d’entreprises ne sont-ils pas enclins à miser plutôt sur la “croissance verte” ?
Quand on creuse ce sujet, on voit rapidement que ça ne tient pas la route. Une approche techno-solutionniste “à l’américaine” n’est pas viable. Cela dit, il faut dépasser le clivage croissance / décroissance. Durant la première session, nous avons parlé de logiciels à déconstruire, notamment la notion de PIB. Nous reprendrons ce sujet en session 3, qui s’appelle “nouvelle boussole”. Idem pour la technologie : ce sera l’objet de la session 4 à Lyon, avec un travail sur la low-tech notamment.
Globalement, les chefs d’entreprises sont souvent des “faiseurs”, ils sont intéressés par une logique problème-solution. Mais la problématique est loin de se résumer à cela. C’est le message que nous souhaitons faire passer : les sujets sont systémiques, il faut une vision globale et non pas linéaire ou manichéenne.
Selon toi, qu’est-ce qui motive les entrepreneurs à adhérer à la Convention ?
Beaucoup sont conscients des risques environnementaux, bien au-delà du changement climatique. Les motivations dépendent de chacun : parfois c’est la biodiversité, parfois c’est la hausse des températures … ou bien la déplétion des ressources naturelles dans certains secteurs.
Globalement, les chefs d’entreprises sont intéressés par une logique problème-solution. Mais la problématique est loin de se résumer à cela.
Il y aussi une motivation positive, c’est l’engagement des équipes. Un projet d’entreprise réaligné impacte très positivement la volonté des employés. Le principal enjeu d’un dirigeant est de maintenir l’engagement de ses équipes sur la durée, en lui apportant du sens et de l’engagement. Sans parler de l’attractivité de l’entreprise pour les recrutements.
Tu t’es inspiré de la Convention Citoyenne pour le Climat [CCC], mise en place par le président Macron mais qui n’a pas eu l’impact espéré. Quelles leçons en as-tu tirées ?
Ce qui me plaisait dans la CCC, c’était d’abord la force du collectif : avec 150 participants, la taille de l’assemblée est imposante mais encore gérable, suffisamment variée, et constitue une force d’entraînement. En outre, chaque participant dispose naturellement de contacts qui lui permettent de faire parler de la CEC. La preuve : la grande majorité des dirigeants du monde économique en ont entendu parler, et ce n’est qu’un début !
Un projet d’entreprise réaligné impacte très positivement la volonté des employés.
D’autres points positifs étaient à relever dans l’organisation de la CCC : le temps long, la maturation entre les sessions avec du travail “à la maison”, les jalons que représentent les sessions …
En revanche, il y a clairement eu de la “perte en ligne” dans la traduction politique. Pour éviter cette perte d’impact, potentiellement démotivante, nous travaillons avec des citoyens de la CCC qui nous aident à préparer la fluidité de nos propositions vers le monde politique.
Et quelles actions as-tu entreprises pour t’assurer de cet impact politique ?
Nous avons surtout travaillé avant la Convention, avec plus de 30 rendez-vous organisés auprès de parlementaires et de hauts fonctionnaires dans les ministères.
Nous aimons véritablement l’entreprise, nous disons juste qu’il faut la reconfigurer, changer son logiciel et sa raison d’être.
Nous nous adressons à tous les bords politiques. Certes, nous sommes sur une “ligne de crête” entre immobilisme incantatoire (le fameux auto-satisfecit déjà évoqué) et l’écologie culpabilisatrice. Nous aimons véritablement l’entreprise, nous disons juste qu’il faut la reconfigurer, changer son logiciel et sa raison d’être.
Un mot sur les livrables de la Convention …
Nous avons présenté plusieurs objectifs de livrables, dès la cérémonie d’ouverture. D’abord, les 150 entreprises participantes réaliseront chacune leur feuille de route, très concrète. J’espère que cela apportera la preuve que tout dirigeant peut se mettre à la hauteur des enjeux, s’il est formé dans les bonnes conditions, dans le bon parcours.
Ensuite, la “151ème” feuille de route sera rédigée pour les acteurs politiques. Ce sera une série de recommandations réglementaires ou législatives pour que l’on atteigne réellement un tiers de préoccupations “planet” dans les stratégies des entreprises ! Pour cela, nous avons une approche d’influence transversale, auprès des députés comme du MEDEF par exemple, mais aussi sectorielle (agriculture, bâtiment …).
Enfin, le dernier livrable – sans doute le plus important – concerne le changement culturel du monde de l’entreprise. Faire grandir le collectif des 1000 à 2000 “entrepreneurs à impact” qui existent en France, et qui sont souvent isolés. Notre but : faire émerger une nouvelle normalité à partir de ces pionniers !
Es-tu soutenu par des acteurs publics dans ta démarche ?
Oui, principalement par l’ADEME qui réfléchit avec nous sur une plateforme de moyens à destination des entreprises – ce serait un écosystème d’accompagnateurs de projets et d’experts thématiques. Un tel parcours de formation inspiré du nôtre, pourrait être un passage obligé pour obtenir des aides économiques.
Le dernier livrable – sans doute le plus important – concerne le changement culturel du monde de l’entreprise.
Il faudrait d’ailleurs que cette logique s’applique au Green Deal européen, dont les milliards sont fléchés principalement vers des grands groupes qui pratiquent encore de la RSE classique et dont la plupart des dirigeants n’ont qu’un vernis de connaissance sur les sujets climatiques.
Selon moi, il est urgent que les PDG, les COMEX et les conseils de surveillance de chaque entreprise, soient véritablement formés à ces sujets. Comme le dit très bien Jean-Marc Jancovici, président du Shift Project, tout dirigeant qui veut être pris au sérieux sur le sujet du climat, doit y avoir consacré au moins 20h de formation.
Y a-t-il une logique de territoire dans l’approche que tu proposes aux participants ?
Cette logique de proximité se traduit de nombreuses manières. Sur la résilience, il s’agit de monter des liens entre le public et le privé, dans un raisonnement d’aménagement du territoire réinventé … car on sait que les entreprises ont beaucoup de cartes en main, mais pas toutes !
Dans le monde de demain, il faudra beaucoup plus de coopération.
Dans le monde de demain, il faudra beaucoup plus de coopération, il y aura moins de frontières entre les acteurs. Les entreprises gagnantes de demain se construiront autour d’un nouveau paradigme de modèle d’affaires, entrecroisé avec les écosystèmes.
Pour conclure, quelle notion-clé les participants doivent-ils emporter de la Convention ?
Ils doivent sortir du “dilemme du prisonnier”. C’est le principe selon lequel, dans une situation de blocage, si tous les acteurs cherchent uniquement leur intérêt personnel, personne ne s’en sort.
Au contraire, il faut miser sur l’intérêt général, le bien commun ! D’où ce double mouvement avec le monde politique, et notre volonté d’élever le niveau de la norme. C’est un pari audacieux … mais il est nécessaire pour sortir de ce dilemme du prisonnier et mettre en mouvement le triangle Etat/entreprises/citoyens vers un futur souhaitable.
Pour aller plus loin (liens et conseils proposés par Eric) : Comprendre – Le roman policier/science-fiction de Jean-Pierre Goux, le Siècle Bleu, qui “met en avant le thème du héros et pousse à se prendre en main” Agir – “Participer à des cercles d’entrepreneurs, agir en collectif … ne pas rester seul !” |
Pas assez de neige, pas assez d’eau, trop de chaleur… comment les acteurs touristiques locaux s’adaptent-ils aux conséquences du dérèglement climatique ?
Rencontre Tikographie du lundi 2 décembre à 17h (librairie des Volcans) – tous publics, accès libre !
Propos recueillis le 27 septembre 2021, mis en forme pour plus de clarté puis relus et corrigé par Eric – avec l’aide de Yannick Servant. Crédit photo de Une : éditeur