Selon Emilie Barat-Duval, l’éducation à l’environnement peut cibler les adultes comme les scolaires

Par

Damien Caillard

Le

La coordinatrice du REEA (Réseau d’Education à l’Environnement Auvergne) revient sur les enjeux pédagogiques mais aussi organisationnels et politiques qu’elle traite à travers l’association, qui regroupe de nombreux acteurs locaux


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Ressenti de l’auteur

Je vous propose une mini-série de deux entretiens consécutifs – aujourd’hui et samedi prochain – autour des enjeux d’éducation à l’environnement. On parle très souvent de “sensibilisation”, et cette notion peut se décliner de multiples façons. Si tout le monde sensibilise d’une manière ou d’une autre, comme la prose de Monsieur Jourdain, seules quelques structures sont dédiées à cet objectif.

Aujourd’hui, Emilie nous parle du REEA, structure discrète car moins visible du grand public, mais qui coordonne des actions à l’échelle de l’Auvergne – avec cette belle notion d'”école du dehors”, qui m’a touché. Samedi prochain, on se retrouve autour des enjeux du CPIE Clermont-Dômes, à Theix. Vous verrez que la problématique du rapprochement avec le monde économique, et en particulier les entreprises, se retrouve dans les deux entretiens (#AlerteSpoiler) (#ZutTropTard)

Damien

Les principaux points à retenir

  1. L’éducation à l’environnement, tel qu’Emilie le définit, consiste à faire découvrir la nature mais aussi à comprendre l’intérêt à la protéger. Le REEA, association “tête de pont” d’acteurs locaux de l’éducation à l’environnement, privilégie ainsi les pédagogies actives et notamment l’école du dehors, au contact de la nature. Mais les publics visés se diversifient, particulièrement en direction des adultes à travers le monde de l’entreprise.
  2. La structure REEA est basée à la maison de la Nature et de l’Environnement de Mozac, près de Riom. Elle est animée par deux salariées, Emilie Barat Duval et Lhéna Salord, et compte environ 80 membres dont la LPO, le CEN Auvergne, le CPIE Clermont-Dômes, mais aussi le CRESNA, les parcs naturels régionaux, des collectivités et des entreprises. Son modèle économique est principalement basé sur des financements pour missionner les membres sur des projets pédagogiques, et quelques subventions de fonctionnement. Il s’élève à 250 000 € par an.
  3. Le REEA participe ainsi à plusieurs appels à projets au niveau régional ou national, notamment sur l’impact de l’école du dehors. Il est également missionné depuis plusieurs années par le CD63 ou encore le Valtom pour sensibiliser les jeunes aux enjeux des déchets alimentaires à la cantine, mais aussi pour accompagner les professionnels locaux dans les établissements scolaires. Il peut aussi former des éducateurs et développe ses propres outils pédagogiques.
  4. Membre du GRAINE ARA, le réseau régional des acteurs de l’éducation à l’environnement, le REEA agit en lien avec d’autres structures similaires dans la grande région (Drôme, Isère….) mais aussi avec des collectifs d’acteurs locaux ailleurs en Auvergne, tout en conservant une autonomie d’action pour chacun.
  5. Les liens avec la communauté d’agglomération Riom Limagne Volcans sont forts, puisque le REEA est basé à Mozac. Mais aussi parce que RLV missionne l’association sur de nombreux projets de sensibilisation et pour les accompagner dans leur stratégie d’éducation à l’environnement. La présence dans la Maison de la Nature et de l’Environnement est un plus indéniable pour Emilie, qui est ainsi proche d’autres structures très actives comme le CEN Auvergne.

L’intervenante : Emilie Barat-Duval

Coordinatrice salariée du REEA Auvergne

D’origine cantalienne, Emilie a suivi une formation en gestion et protection de la nature, notamment par un brevet “protection de l’environnement”. Elle travaille dans ce milieu depuis le début des années 2000, d’abord comme guide scientifique dans un écosite lorrain, puis au sein d’une entreprise de recyclage des plastiques. Elle y passe le BPJEPS.

Par la suite, elle anime l’association naturaliste Demain la Terre dans l’Hérault, pendant 5 ans. Il s’agit de gérer des gravières – des anciennes carrières en réhabilitations – et de sensibiliser les scolaires sur ces problématiques.

Elle évolue ensuite en Isère, “pour découvrir le milieu extra scolaire”. Elle revient référente environnement chez Evade, une structure gérant 13 centres de loisirs sur le territoire d’Echirolles. “J’y ai développé des projets pédagogiques sur l’eau” notamment, pendant deux ans. Elle entre alors à l’Espace Nature Isère avec une approche d’animatrice multithématique en environnement (énergie, déchets…) et avec pour mission de développer l’angle pédagogique du festival Avenir au Naturel, un évènement important de l’écosystème local sur l’agriculture biologique.

C’est en 2010 qu’elle revient en Auvergne, en chargée de communication et d’animation sur les sujets de restauration collective à Auvergne biologique. Elle commence à y travailler avec de nombreux acteurs de l’écosystème local.

En 2014, Emilie reprend quelques études, et passe une licence pro pour validation d’expérience en coordination de projets pédagogiques. Elle poursuit par une licence pro de gestion de l’ESS à Clermont, puis un master en management et administration des entreprises en 2015. Elle entre alors comme coordinatrice à l’URSCOP, antenne auvergnate, pendant7 ans. “Cela m’a permis de monter de nombreux projets collectifs”, résume-t-elle. Sur les deux dernières années, elle y a aussi accompagné des projets naissants, de l’idée à la création de la structure.

Après la pandémie de Covid-19, son questionnement personnel la pousse à revenir vers la protection de la nature. Elle devient coordinatrice salariée du REEA, poste qu’elle occupe à ce jour.

Contacter Emilie par mail : coordination [chez] ree-auvergne.org
Contacter Emilie par téléphone : 06 56 67 93 24
Crédit photo : Damien Caillard, Tikographie

La structure : le Réseau Education à l’Environnement Auvergne (REEA)

Association “tête de pont” des acteurs de l’éducation à l’environnement sur les quatre départements auvergnats

Le REEA est un réseau territorial d’acteurs variés – personnes morales et individus – qui œuvrent à l’éducation et à la sensibilisation à l’environnement de différents publics (scolaires mais aussi jeunes adultes et adultes, notamment en entreprise). Il fait partie du réseau GRAINE ARA.

Sous forme associative, le REEA est basé à Mozac, près de Riom, dans la Maison de la Nature et de l’Environnement. Il y compte deux salariées pour l’animation et la coordination des projets, ainsi qu’un espace ressources.

Avec près de 80 adhérents dont de nombreux acteurs du monde économique, le REEA est à la fois un lieu d’échanges de pratiques, un espace de rencontre, et une structure coordonnant des actions collectives et parfois multi-territoriales. Il arrive que le REEA initie des projets en répondant à des appels à manifestation d’intérêt au niveau national.

Enfin, le REEA peut former des éducateurs à l’environnement et accompagner des projets éducatifs territoriaux, notamment ceux portés par les collectivités territoriales. Dans ce cadre, le REEA est par exemple missionné depuis plusieurs années par le Valtom et par le Conseil Départemental du Puy-de-Dôme pour travailler auprès des jeunes sur la thématique de la réduction des déchets alimentaires à la cantine.

Visiter le site du REEA
Crédit visuel : REEA (DR)

Pas assez de neige, pas assez d’eau, trop de chaleur… comment les acteurs touristiques locaux s’adaptent-ils aux conséquences du dérèglement climatique ?

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Comment définis-tu l’éducation à l’environnement ?

L’éducation à l’environnement et au développement durable [EEDD] vise à répondre à la question : “quel intérêt ai-je à préserver la nature ?”, mais aussi à la faire découvrir. Nous le faisons par plusieurs méthodes pédagogiques. Notre but, ici, est de développer l’esprit critique, la responsabilisation, ou encore la connaissance des enjeux.

Nous souhaitons aussi concourir à la protection de la nature et de l’environnement des publics visés, par des actions de sensibilisation, d’information, d’éducation et de participation. C’est pourquoi l’EEDD privilégie les pédagogies actives – au contact de la nature – plutôt que des animations dans les salles de classe. C’est ce que l’on appelle “l’école du dehors”.

Les membres du REEA organisent, seuls ou à plusieurs, de nombreuses actions de sensibilisation. Ici, l’école buissonière de la LPO à Moulet Marcenat, près de Volvic / Crédit photo : REEA (DR)

Quels sont les acteurs du Réseau d’Education à l’Environnement Auvergne [REEA] ?

Le REEA est, plus précisément, une “tête de réseau” de l’éducation à l’environnement en Auvergne. Il y a une grande diversité d’acteurs au sein de ce réseau, principalement des associations naturalistes comme la LPO [Ligue de Protection des Oiseaux], le CEN [Conservatoire d’Espaces Naturels], des associations d’éducation à l’Environnement et au Développement Durable comme par exemple les CPIE [Centre Permanent d’Initiatives pour l’Environnement] mais aussi de plus petites structures. 

“Notre but, ici, est de développer l’esprit critique, la responsabilisation, ou encore la connaissance des enjeux.”

Également font partie de notre réseau des acteurs de l’Economie Sociale et Solidaire comme Carbala ou le CRESNA qui sont des coopératives. Enfin, il y a des entreprises et des auto-entrepreneurs acteurs de l’EEDD, les 2 parcs naturels régionaux, des collectivités, et des particuliers. Cela représente au total plus de 80 adhérents. 

En interne, nous sommes deux salariées : Lhéna Salord pour l’animation réseau et la coordination de certains projets pédagogiques, et moi-même pour la coordination de la structure et d‘initiatives. Personnellement, j’ai un rôle de facilitatrice de démarches collaboratives, de coordination de dispositifs, de développement de projets et de partenariats. 

Lire l’entretien : Au CEN Auvergne, Pierre Mossant favorise les « solutions fondées sur la nature »

Et quel est votre mode de fonctionnement pour atteindre vos objectifs ?

Le REEA est un réseau horizontal, où les projets partent des membres à destination de publics variés. Ces projets pédagogiques sont co-construits entre les adhérents, et Lhéna et moi accompagnons, coordonnons et valorisons ces démarches. Ils sont par la suite animés par les membres eux-mêmes, en fonction des publics visés et compétences et thématiques spécifiques.

Ainsi, le REEA coordonne des dispositifs à l’échelle de certains territoires. Nous bénéficions de collectivités qui nous soutiennent comme des communautés d’agglomération – par exemple Clermont Auvergne Métropole, Riom Limagne et Volcans [RLV] – des Conseils Départementaux –  Allier, Haute-Loire et Puy-de-Dôme – mais aussi des syndicats de tri et collecte des déchets comme le VALTOM. Il arrive enfin que certains projets d’ampleur [passent par des dispositifs plus importants] comme des Appels à Manifestation d’Intérêt [AMI], des Appel à communs et autres projets de périmètre national.

Les membres de l’A.G. de l’association REEA en 2023, qui a entériné une évolution de l’organisation et un rapprochement avec le monde économique. Emilie est debout, deuxième sur l’escalier à gauche / Crédit photo : REEA (DR)

Peux-tu nous donner quelques exemples de ces actions menées à plusieurs ?

Je parlais des AMI : nous attendons un financement accordé pour un projet de “recherche-action” sur l’école du dehors, que nous allons mener dans une école du Puy-de-Dôme à partir de fin 2023-2024. L’objectif est d’étudier l’impact de l’école du dehors sur un établissement scolaire spécifique et sur plusieurs années. Il y a tout de même une vingtaine de structures territoriales qui y ont candidaté, partout en France !

“Le REEA est, plus précisément, une “tête de réseau” de l’éducation à l’environnement en Auvergne.”

De même, en 2022, nous avons pu participer à un appel à communs “Grandir avec la Nature”. Il s’agit ici de réaliser un état des lieux, quinze temps d’échanges, et une journée de partage avec des acteurs auvergnats sur l’école du dehors – le tout, visant le développement en Auvergne de cette dernière. C’est un travail spécifique en relation avec le rectorat, l’académie de Clermont-Ferrand et ses partenaires, qui impliquent une dizaine de membres du REEA.

Y a-t-il également des initiatives sous la forme de conventions ou de prestations ?

Oui, par exemple avec le VALTOM : nous travaillons ensemble depuis une décennie sur la thématique de la réduction des déchets, et cela représente plus de 50 000 € de financement chaque année alloué au REEA. Les publics visés sont les jeunes, et nous faisons à leur attention de la prévention en milieu scolaire, en centres de loisirs, au lycée et à l’université.

Nous insistons par exemple sur la lutte contre le gaspillage alimentaire, la réduction et valorisation des déchets. Nous travaillons aussi sur des actions correctives au sein des établissements avec de la sensibilisation, de la concertation et des formations à destination des agents des établissements scolaires.

Autre exemple : le Conseil Départemental du Puy-de-Dôme, avec cinq collèges que nous accompagnons chaque année, depuis plus de treize ans ! Dans ce cas, il s’agit d’une approche globale d’éducation à l’environnement qui va au-delà de la sensibilisation. Elle est dirigée autant vers les élèves que vers les agents et les responsables des établissements. Ainsi, le 9 mai, nous avons participé à l’inauguration  du “self collaboratif” du collège de Murat-le-Quaire (63), là aussi sur la thématique de la lutte contre le gaspillage alimentaire.

Lire l’entretien : Emmanuelle Pannetier travaille sur l’économie circulaire car « c’est au niveau territorial qu’on aura le moins d’impact »

Au total, notre budget de fonctionnement est d’environ 250 000 € par an. Ce chiffre comprend les interventions des membres du REEA dans les dispositifs pédagogiques, assuré à 70% par des projets pour lesquels nous coordonnons les actions et missionnons nos membres. Restent les subventions de fonctionnement de la DREAL, du Ministère de la Jeunesse et des Sports (DRAJES), et de la Ville de Clermont-Ferrand. Les adhésions comptent finalement assez peu dans notre modèle économique.

Exemple d’opération du REEA pour le Conseil Départemental, avec le travail sur la réduction des déchets alimentaires dans les collèges puydômois / Crédit photo : REEA (DR)

Est-il nécessaire de former les éducateurs à la nature et à l’environnement ?

En tous cas, il faut les soutenir ! Et cela inclut les actions de formation, bien entendu. Nous organisons donc, à leur attention, des journées dédiées avec des temps d’échanges de pratiques, mais aussi de la présentation d’outils pédagogiques.

Nous pouvons d’ailleurs aussi créer nos propres outils, souvent en lien avec certains membres du REEA. Cela a été fait à travers par exemple une exposition “Des racines et des fleurs”, sur l’alimentation durable et la biodiversité.  

“Je pense qu’il faudrait former davantage les jeunes et les adultes, notamment dans le cadre de l’entreprise.”

Dans cette logique, nous mettons à disposition de nos membres une série de “malles” qui contiennent un ensemble d’outils, dont des livrets thématiques et des jeux pédagogiques. Par exemple, l’une d’entre elles s’appelle « la malle Ricochets » : elle comporte des planches en bois, avec divers matériaux pour illustrer les forêts, l’eau, les montagnes, les routes… le but du jeu est ici de reconstituer le paysage de l’eau, de la source à la mer, et le bassin versant.

Quelques éléments sortis de la “Malle Ricochets” (le gros sac noir que l’on devine à droite), avec un guide pédagogique et des pièces en bois pour symboliser le cycle de l’eau / Crédit photo : Damien Caillard

L’éducation à l’environnement est-elle encore efficace compte tenu de l’urgence écologique ?

C’est vrai que l’on sensibilise de plus en plus les scolaires. D’ailleurs, l’éducation à l’environnement existe dans les programmes officiels depuis environ 2010, et l’on va de plus en plus dehors, au contact de la nature. C’est une bonne chose… mais est-ce la bonne cible ? 

En fait, je pense qu’il faudrait former davantage les jeunes et les adultes, notamment dans le cadre de l’entreprise. Et je sens que cette tendance s’accélère depuis la pandémie de Covid-19 : en tous cas, nos financeurs nous le demandent de plus en plus, nous avons même des actions en direction de ce public (ateliers, sorties nature). La RSE [Responsabilité Sociétale et Environnementale] me semble être le bon levier, pour mêler la découverte de la nature, l’environnement et l’intérêt de l’entreprise.

Lire l’entretien : Pour Géraud Dorchies, « quand la RSE n’est pas sincère, elle finit par se retourner contre l’entreprise. »

Mais vous comptez peu d’acteurs du monde de l’entreprise dans le réseau…

Le REEA est issu du monde naturaliste et associatif. Il y avait une certaine méfiance historique vis-à-vis du monde de l’entreprise. Mais ça commence à évoluer ! Notre association régionale [au niveau Auvergne-Rhône-Alpes, NDLR], le GRAINE ARA, a par exemple établi un partenariat  avec Veolia Eau France et le GRAINE Bourgogne-Franche-Comté pour sensibiliser à la question des micropolluants dans l’eau. D’autres associations d’éducation à l’environnement le font au national. 

Je sens donc un vrai changement de paradigme, mais il faut malgré tout rester vigilant sur les tentatives de greenwashing

Tu as accompagné le vote de nouveaux statuts très récemment. Le nouveau projet du REEA va-t-il dans ce sens ?

Oui, d’abord parce que nous avons constaté que près de la moitié de nos 80 adhérents étaient des entreprises ou des auto-entrepreneurs. Et ce, bien que les fondateurs du REEA étaient initialement axés sur le monde associatif, non lucratif, loin du monde économique.

Nous avons donc acté que les logiques actuelles nous poussaient de plus en plus vers le secteur marchand. Même nos financements évoluent, de subventions sous convention d’objectifs à des marchés avec mise en concurrence. Aujourd’hui, nous sommes d’ailleurs assujettis à la TVA pour cette raison – car le ratio de nos prestations sur nos revenus totaux nous place dans le champ concurrentiel.

“Il y avait une certaine méfiance historique vis-à-vis du monde de l’entreprise. Mais ça commence à évoluer ! “

Mais le nouveau projet est aussi l’occasion de nous réorganiser en pôles thématiques. Il y en a désormais quatre : la formation et accompagnement des professionnels de l’éducation à l’environnement, les projets collectifs, l’animation du réseau (dont la participation à des réseaux nationaux comme le FRENE) et enfin le développement de l’éducation à l’environnement sur les territoires (concertation, partenariats, journée d’échanges, création et diffusion d’outils pédagogiques, accompagnement de politiques de territoires, recherche-action, …). En transversal, nous avons aussi un sous-pôle communication, qui diffuse et valorise les actions des membres du réseau. 

Lors de groupes de travail, les membres du REEA sont emmenés sur différents sites naturels avec des supports pédagogiques pour travailler sur ces derniers / Crédit photo : REEA (DR)

Le REEA est basé dans la “Maison de la Nature et de l’Environnement” près de Riom à Mozac. Est-ce plus pertinent que d’être à Clermont ?

C’est en effet la seule Maison de la Nature en Auvergne à ce jour. Et nous nous devions d’en être pour accompagner cette initiative ! C’était aussi l’occasion d’être géographiquement proche d’autres structures dans le domaine de l’environnement comme le CEN Auvergne. Plus largement, l’objectif de RLV [qui a financé ce site, NDLR] est d’y installer davantage de structures dédiées à l’environnement, et pour cela d’aménager d’autres bâtiments autour de ce qui était un ancien couvent.

Dans ce cadre, nous avons d’ailleurs proposé la création d’un “espace ressources” commun aux différentes structures occupantes. Au-delà de la pièce existante [qui fait office de petite bibliothèque, NDLR] il s’agit par exemple d’accueillir des événements, des expositions, des présentations d’outils pédagogiques. Nous espérons également avoir des aménagements extérieurs pour mieux sensibiliser, comme des sentiers d’interprétation…

Tu parlais d’accompagner les territoires. Y a-t-il une synergie particulière avec RLV ?

Nous sommes missionnés par RLV depuis 2008 sur des projets d’éducation à l’environnement, tels des sorties nature à destination de scolaires. Mais aussi des initiatives grand public sur la biodiversité, l’eau, l’alimentation durable, les risques majeurs… Enfin, nous allons prochainement accompagner RLV dans la définition et la mise en place, sur 3 ans, de la nouvelle stratégie EEDD de son service environnement.  

Je dirais que RLV reconnaît notre apport. Cette communauté d’agglomération a une vraie sensibilité, en particulier sur la question de la biodiversité – ils ont participé à l’Atlas de la Biodiversité, et nous missionnent toujours sur des projets en lien avec cette thématique. Enfin, RLV travaille avec le CEN Auvergne sur la restauration et la gestion d’espaces naturels comme les Espaces Naturels Sensibles. Et ils avancent aussi sur les questions de mobilité durable.

L’école du dehors, c’est emmener les petits touts qu’il fasse chaud ou froid. L’important est d’être au contact de la nature, pour mieux en appréhender son fonctionnement / Crédit photo : REEA (DR)

Le REEA a-t-il une ambition au-delà du Puy-de-Dôme ?

Nous souhaitons même influencer les mesures nationales en faveur de l’éducation à l’environnement ! Par exemple, il faut aussi favoriser le développement de l’école du dehors et insister sur l’intérêt du contact direct avec la nature. Cela doit se faire auprès d’acteurs comme les inspecteurs et conseillers pédagogiques de l’Education Nationale, dans chaque territoire. Car nous devons nous appuyer sur eux pour la diffusion auprès des établissements scolaires.

“Nous sommes missionnés par RLV depuis 2008 sur des projets d’éducation à l’environnement”

Cela dit, nous ne ferons pas ce travail de plaidoyer seuls. Il y a d’autres Réseaux d’éducation à l’environnement dans les départements rhônalpins, comme dans la Drôme avec le REED, l’Ardèche avec Pétale 07, les Alpes avec Educ’Alpes, la Loire avec le Collectif Loire des acteurs EEDD… idem dans d’autres territoires.

En outre, chaque grande région a sa propre stratégie et structuration de son réseau. En Auvergne-Rhône-Alpes, nous faisons partie de l’association GRAINE ARA, ce qui nous permet de travailler en complémentarité et avec d’autres acteurs du territoire. Et cette méta-structure coordonne certaines actions transversales, comme celle portant sur le Pôle Education Santé Environnement avec l’IREPS ARA – financé par l’ARS [Agence Régionale de Santé].

Et peut-on envisager des passerelles ailleurs en Auvergne ?

C’est en effet notre objectif pour nos 20 ans, qui auront lieu en 2024 : on aimerait territorialiser les actions. En Haute-Loire, par exemple, il y a un comité départemental qui s’est monté en 2022 avec des membres du REEA. Ensemble, ils ont lancé une dynamique d’événements sur des échanges de pratiques début 2023. 

“Il faut montrer que l’écosystème des acteurs locaux n’est pas cloisonné.”

Avec Lhéna, nous accompagnons ce type de dynamique, sans pour autant les rendre dépendantes de nous. Il y a aussi une demande du Conseil Départemental de la Haute-Loire pour une série de projets pédagogiques collectifs coordonnés par le REEA où les membres du REEA interviennent.

Et il ne faut pas oublier les actions transversales en Auvergne, comme celle sur l’école du dehors, ou celle avec le Valtom que j’ai déjà évoquées. En 2024, nous allons aussi travailler sur un gros projet autour de l’eau et de la rivière Allier, qui traverse plusieurs territoires et bassins versants. Et nous aurons enfin des groupes de travail à monter notamment sur la biodiversité, l’alimentation durable. Tous ces projets se feront au niveau auvergnat.

Lire l’entretien : « Il y aura moins d’eau, et on sera forcé de s’y adapter », prévient Cyril Bessey

Au final, es-tu plutôt confiante sur la réponse des membres du REEA à la crise environnementale ?

Pour moi, la résilience dont on parle souvent passe par une progression de l’éducation à l’environnement, en particulier sur les publics non scolaires. C’est vraiment capital que tout le monde prenne conscience de ce qu’il se passe, et soit convaincu qu’il peut faire quelque chose, dès maintenant !

Pour y parvenir, il faut montrer que l’écosystème des acteurs locaux n’est pas cloisonné. Mon parcours personnel m’a permis de le comprendre : il faut développer, de manière proactive, des liens entre ces structures. Sans cela, elles ont tendance à se cantonner dans leur périmètre. Au contraire, il faut créer ensemble, collectivement.

Ressources complémentaires proposées par Emilie :
Comprendre – Le “Guide pratique d’éducation à l’environnement – entre humanisme et écologie” aux éditions Yves Michel
AgirAdhérer au REEA mais aussi profiter des ressources gratuites et participer aux journées d’échange

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Propos recueillis le 12 mai 2023, mis en forme pour plus de clarté et relus et corrigés par Emilie. Crédit photo de Une : Damien Caillard, Tikographie