Pour notre nouvelle rubrique “carte blanche”, nous ouvrons nos colonnes à Yoan de Macedo, auteur d’un blog où il développe ses réflexions sur le numérique, les urgences écologiques, les modes de vie… Il a choisi de nous parler d’un sujet auquel nous devrions tous prêter une grande attention.
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L’auteur : Yoan de Macedo
Développeur web et blogueur éco-inquiet
Informaticien clermontois depuis le début des années 2000, Yoan de Macedo a été cofondateur de la société Octolys qui, avec 15 ans d’avance sur la crise sanitaire, développe à partir de 2005 Thelia, un outil permettant aux petits commerces de pratiquer la vente en ligne.
Parallèlement, il commence dès cette époque à se questionner sur les effets du numérique et défend notamment la notion de logiciel libre. Il commence à s’exprimer à travers un blog.
En 2012, Octolys fusionne avec l’agence web auvergnate Open Studio. C’est l’occasion pour Yoan de démarrer une nouvelle aventure en free-lance pour accompagner des entreprises et commerçants dans le développement d’activités de e-commerce.
Vers 2015-2016, de nouvelles préoccupations et thématiques apparaissent sur son blog, témoignant d’une prise de conscience des urgences écologiques et du rôle du numérique – pas forcément positif comme on le présente souvent – dans ces problématiques.
Son blog développe ces thématiques, mais aussi une réflexion plus générale sur les modes de vie et sur la nécessité de sobriété.
Aujourd’hui installé à Ennezat et toujours free-lance, il poursuit son activité en essayant de répondre à sa dissonance cognitive par le conseil en éco-conception et en sobriété numérique.
Pas assez de neige, pas assez d’eau, trop de chaleur… comment les acteurs touristiques locaux s’adaptent-ils aux conséquences du dérèglement climatique ?
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Dans les médias, les solutions envisagées pour la transition écologique sont de plus en plus mises en avant. C’est une bonne nouvelle. En effet, la technique peut nous aider à réussir cette prouesse vertigineuse et indispensable. On ne parle ni plus ni moins que de parvenir à garder la terre habitable. La tâche à accomplir est immense.
Mais la technique ne suffira pas. Nous n’en parlons décidément pas assez. Réduire cette transition à un problème technique est, je crois, une erreur monumentale.
Prenons l’exemple de la voiture électrique. Suffisamment utilisée, elle émet beaucoup moins de CO2 qu’une voiture thermique sur son cycle de vie complet. C’est un fait. Mais elle nécessite beaucoup plus de cuivre notamment. Remplacer tout le parc automobile n’est donc pas anodin du tout (et le cuivre n’est pas le seul élément concerné). Le CO2 est notre principal problème mais il est loin d’être le seul. Résumer la transition à cet indicateur est très dangereux. Je ne veux pas du tout dire par ailleurs que la voiture électrique n’est pas intéressante. J’y reviendrai plus loin.
“La technique seule est neutre, c’est la façon dont nous l’utilisons qui prime.”
Mais ce n’est pas tout. Si demain, je dispose d’une voiture électrique, n’aurais-je pas tendance à la prendre davantage pour les petits trajets à la place de mon vélo ou tout simplement d’une bonne marche à pied ? C’est ici qu’intervient le terrible effet rebond appelé aussi “Paradoxe de Jevons”. Les gains apportés par l’amélioration technique sont souvent annulés (et parfois pire) par ce phénomène. Les exemples ne manquent pas. Les voitures consomment moins ? On les utilise davantage et on en construit des beaucoup plus lourdes. On parvient à compresser la vidéo en ligne ? Augmentons alors la résolution de l’image. On améliore l’isolation des bâtiments ? On chauffe davantage pour plus de confort. La liste pourrait être largement complétée. La technique seule est neutre, c’est la façon dont nous l’utilisons qui prime.
Ce dont on a d’abord besoin, c’est d’un nouveau modèle de société avec d’autres valeurs, d’autres objectifs de vie. C’est probablement plus complexe à mettre en place que la simple réponse technique (elle-même déjà difficile à mettre en œuvre). Comprendre l’urgence de la situation pour changer de braquet est l’étape indispensable.
Voyons le côté positif : de nombreux métiers sont à créer. Il faudra se former, accepter de changer d’activité dans certains cas mais les perspectives sont nombreuses. La technique pourra accompagner ce changement et elle est bien utile. Mais, isolée du changement de paradigme, je ne crois vraiment pas qu’elle nous permettra de parvenir à nos objectifs.
“Voyons le côté positif : de nombreux métiers sont à créer.”
L’effet rebond doit donc absolument être étudié et pris en compte lorsqu’on parle d’innovation technique censée améliorer la situation environnementale. En parvenant à limiter cet effet, il est clair que certaines innovations sont tout à fait pertinentes et nécessaires. La voiture électrique en est un très bon exemple.
Je tenais à écrire quelques mots sur ce sujet pour tenter de populariser un peu plus ce concept (plus nous serons à le faire et plus le message sera visible) pour que chacun prenne conscience que le “technosolutionnisme” pris de manière isolée risque de n’être qu’un leurre. Je ne suis pas sûr que l’humanité ait encore le loisir de prendre un mauvais chemin ou un chemin trop sinueux. Je sais aussi que ces lignes ne changeront pas le monde mais si quelques personnes en discutent avec quelques autres, alors… le colibri aura participé à une juste cause.
Les spécialistes nous rabâchent chaque année que la situation est grave, que le sablier se vide et qu’il reste peu de temps pour limiter les plus gros effets du changement climatique. Les conséquences sont déjà très présentes dans de nombreux endroits du globe et commencent sérieusement à se faire sentir chez nous aussi. Nous devrons collectivement accepter de faire évoluer nos modes de vie si nous souhaitons garder une planète habitable avec une certaine sérénité.
Yoan de Macedo
Lire le portrait : “Yoan de Macedo, numérique mais pas trop” |
Photo Terrillo Walls / Unsplash
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