Le pourquoi et le comment [cliquer pour dérouler]
C’est vrai, je vous gâte ces temps-ci !
Enchaîner un (double) sujet sur la valorisation du contenu de nos poubelles avec un autre (double) sujet sur le traitement de nos “poubelles liquides”, c’est un peu un hasard du calendrier de mes opportunités de reportage.
Mais ça tombe plutôt pas mal : c’est bien d’insister sur ces sujets un peu rebutants au premier abord, mais tellement importants, autant en termes de volumes qu’en termes d’enjeux.
C’est sans doute un des gros défis de notre humanité égarée : on ne va pas pouvoir continuer à rendre inutilisable, inerte voire dangereux tout ce qui nous passe entre les mains.
La poussière que nous mettons sous le tapis commence à faire des bosses bien bien visibles.
Et donc, une bonne plongée dans l’univers de tout ce qui est mis en place, en aval de nos poubelles et de nos toilettes, peut contribuer à nous faire prendre conscience de l’ampleur du problème et à nous rendre tous un peu plus respectueux des consignes…
Marie-Pierre
Au moment où vous lisez cet article, vous venez peut-être de prendre une douche, de tirer la chasse d’eau, de lancer une machine à laver… Voilà : vous avez créé des « eaux usées ». Vous êtes-vous demandé ce qu’elles deviennent ?
Si votre habitation est raccordée au système d’assainissement collectif dans la métropole de Clermont, vous devez avoir dans l’idée qu’elles s’acheminent par un vaste réseau de canalisations vers la station d’épuration des Trois-Rivières. C’est vrai pour une grande majorité du territoire de la Métropole : seules les eaux usées de Pont-du-Château, Lempdes et une partie de Cournon sont drainées vers une autre station, de même que celles d’Orcines et Saint-Genès-Champanelle. “Pour les zones situées sur le plateau, ce ne serait pas logique de faire remonter les eaux jusqu’en bordure de faille de Limagne puis traverser tout Clermont. A l’inverse, nous traitons l’assainissement de la commune de Sayat, qui ne fait pas partie de la Métropole, et celui de la Biopole de Saint-Beauzire”, explique Muriel Burguière, directrice du Cycle de l’eau à Clermont Auvergne Métropole, qui m’accueille sur le site avec Alexandre Moussy, responsable de l’exploitation de la station d’épuration.
Cet équipement de grosse capacité absorbe pour les traiter les eaux usées de 19 communes, soit l’équivalent des rejets de 425 000 habitants. En réalité, cela inclut 300 000 habitants. S’y ajoutent les eaux provenant des cuisines et toilettes des entreprises – mais pas celles des installations industrielles souillées d’autres types pollutions, que le site des Trois-Rivières n’est pas équipé pour traiter.
Il reste une centaine d’exemplaires du nouveau recueil “l’année tiko 2024” en pré-commande ! Sortie le jeudi 5 décembre pour notre Soirée Tiko 2024
20 millions de m3
Les eaux usées s’acheminent donc à travers des conduites souterraines de plus en plus grosses, le plus possible en gravitaire, par écoulement naturel, et grâce à des postes de relèvement là où c’est nécessaire. Ce réseau est en partie « séparatif », mais sur l’autre partie – relativement importante – « unitaire », c’est-à-dire qu’il mélange ces eaux venant de nos robinets aux eaux de pluie. L’ensemble des canalisations aligne un total de 1250 km.
Puis tout cela déferle par une unique « porte d’entrée » dans la station d’épuration, ce vaste site au nord-est de l’agglomération que tous les Clermontois ont au moins aperçu depuis l’autoroute A71.
Annuellement, cela représente 20 millions de m3 d’eaux transportées et traitées. Au quotidien, on retiendra que la capacité des bassins de traitement biologique est de 80 000 m3 et que les eaux parcourent le circuit entre l’entrée et la sortie de la station en deux jours environ.
Que leur arrive-t-il dans ce parcours ? Suivons-les…
Le bâtiment des pré-traitements
L’eau entre avec une belle couleur marron foncé et environnée d’une forte et peu agréable odeur. Elle va peu à peu se dépouiller de tout ce dont nous l’avons souillée, en passant par différents traitements : les odeurs, les matières solides les plus grossières qu’on appelle ici « bâtards », les sables, les graisses, les pollutions…
La suite de votre article après une petite promo (pour Tikographie)
Pas assez de neige, pas assez d’eau, trop de chaleur… comment les acteurs touristiques locaux s’adaptent-ils aux conséquences du dérèglement climatique ?
Rencontre Tikographie du lundi 2 décembre à 17h (librairie des Volcans) – tous publics, accès libre !
Merci pour votre temps de cerveau disponible ! Le cours de votre article peut reprendre.
Au grand air
Les eaux sont maintenant prêtes à sortir à l’air libre… mais encore très loin d’être propres. Elles sont dirigées vers les deux plus grands bassins pour être débarrassées de ce qui constitue les principales pollutions des rivières : carbone, azote et phosphore.
Ici, c’est un traitement biologique qui les attend. Car les éléments indésirables sont littéralement dévorés par les bactéries présentes dans ces bassins. Le processus est favorisé par le passage successif de l’eau dans des zones aérobie où de l’air est impulsé par des aérateurs, et anaérobie. Zones qui forment trois bassins concentriques dans lesquels l’eau circule successivement.
Où va l’eau ?
Comment est-elle restituée ? De deux façons. Pour partie, elle repart directement dans l’Artière.
Mais pour une autre partie, elle est dirigée vers les lagunes de l’ancienne sucrerie Bourdon, qui se trouvent juste de l’autre côté de la route. Elles permettent ainsi de prolonger un usage qui avait cours depuis longtemps avec la sucrerie fermée depuis fin 2019 : la réutilisation de ces eaux usées pour l’irrigation agricole. Car l’ASA Limagne Noire, qui regroupe 55 agriculteurs, fait figure de pionnière d’une pratique récemment mise en avant pour lutter contre les menaces de pénurie d’eau : la réutilisation ou “réut”. Ici, entre les eaux usées domestiques de l’agglomération clermontoise et l’eau de lavage des betteraves, la “réut” est pratiquée depuis 1996.
“L’état de l’Artière n’est pas bon, mais il n’est pas différent de celui du Bédat ou de la Tiretaine.”
Muriel Burguière
Reste la question de savoir dans quel état sort l’eau à l’issue de son parcours dans la station des Trois-Rivières. “Elle respecte les normes qui nous sont imposées dans le but d’atteindre les objectifs de la Directive européenne sur l’état des rivières, indique Muriel Burguière. L’état de l’Artière n’est pas bon, mais il n’est pas différent de celui du Bédat ou de la Tiretaine. Sans surprise, les trois cours d’eau sont classés en bon état dans leur partie amont, puis en mauvais état à partir de leur traversée de l’agglomération.”
L’effort de la Métropole pour améliorer la situation et la qualité de l’assainissement est cependant constant. Il se traduit notamment par d’importants travaux actuellement en cours à la station des Trois-Rivières. Voyons ça de plus près dans le prochain article.
Prochain article : « Trois-Rivières 2/2 : comment évolue l’assainissement à Clermont ? »
Reportage (texte et photos) Marie-Pierre Demarty, réalisé le 22 avril 2024. A la une : au premier plan, l’un des deux bassins de traitement biologique des eaux usées, où elles sont débarrassées des principaux polluants par l’action des bactéries.
Soutenez Tikographie, média engagé à but non lucratif
Tikographie est un média engagé localement, gratuit et sans publicité. Il est porté par une association dont l’objet social est à vocation d’intérêt général.
Pour continuer à vous proposer de l’information indépendante et de qualité sur les conséquences du dérèglement climatique, nous avons besoin de votre soutien : de l’adhésion à l’association à l’achat d’un recueil d’articles, il y a six façons d’aider à ce média à perdurer :
La Tikolettre : les infos de Tikographie dans votre mail
Envie de recevoir l’essentiel de Tikographie par mail ?
Vous pouvez vous inscrire gratuitement à notre newsletter en cliquant sur le bouton ci-dessous. Résumé des derniers articles publiés, événements à ne pas manquer, brèves exclusives (même pas publiées sur le site !) et aperçu des contenus à venir… la newsletter est une autre manière de lire Tikographie.