Le pourquoi et le comment [cliquer pour dérouler]
Pas de champagne qui coule à flot, pas de trophées décernés, pas de célébrités avec qui faire des selfies, ni robes du soir à paillettes, ni smoking…
A force de proclamer qu’il faut “faire autrement”, nous réinventons aussi la soirée mondaine, avec un peu plus de chaleureuse sincérité et un peu moins de vernis, des intervenants (réellement) inspirants, qui connaissent (réellement) leur sujet car il est fondé sur leur vécu. Et des participants pas trop nombreux, ce qui favorise les échanges car dans le bel espace de la Baie des Singes, on n’a jamais la sensation d’être “perdu dans la foule”.
Bref, je ne sais pas vous mais personnellement, je n’aime pas les mondanités… à l’exception de la Soirée Tiko. On se dit “à l’année prochaine ?”
Marie-Pierre
Trois infos express [cliquer pour dérouler]
- La deuxième Soirée Tiko a rassemblé une cinquantaine de personnes à la Baie des Singes la semaine dernière. Une belle occasion de se rencontrer et se soutenir, entre Puydômois heureux de partager leur engagement, leur besoin de s’informer et de comprendre les mutations en cours, inquiétantes ou réjouissantes.
- Nous avons sélectionné pour intervenir lors de cette soirée les porteurs de quatre initiatives qui ont fait l’objet d’un reportage dans Tikographie. Cécile Alibart (Fleur’T avec les Sens), Christophe Gathier (vergers-conservatoires du Conservatoire d’espaces naturels d’Auvergne), Christine Couasnon (café-couture Flax) et Eric Villain (Rochias) sont venus nous raconter les avancées de leurs projets. Avec en prime un témoignage de Philippe Pelade, co-gérant de la librairie des Volcans, et le spécialiste de l’incrustation non-sollicitée, notre meilleur ennemi Monsieur Réchauffement climatique.
- La soirée était aussi dédiée au lancement de notre recueil “L’année Tiko 2024” : 104 pages, 16 reportages, 5 chapitres, de belles photos grand format et une belle couverture ornée de coquelicots printaniers. En vente à Tikographie et aux Volcans !
Une production chinoise presque entièrement relocalisée en Auvergne. Une Saint-Valentin déplacée à la Sainte-Valentine. Une charte de bon gouvernement. Dix mille arbres. Et un nouveau média qui pourrait nous faire de l’ombre… en apportant de la chaleur.
Un projet sur le point d’éclore et une entreprise vieille d’un siècle et demi. Une association de quartier et la déclinaison locale d’une ONG nationale. Une coopérative bien réelle qui vend de la fiction et une entreprise bien fictive qui se plaît à écorner le réel.
Des fleurs, des figues, de l’ail et du lin. Des coquelicots et un buffet végétarien. 104 pages de récits puisés sur le territoire du Puy-de-Dôme.
Des rencontres et des discussions, des contacts et des retrouvailles. Et des échanges de coordonnées – plutôt sur des bouts de papier qu’avec de trop formelles cartes de visite.
Des signatures et des sourires.
Timelapse
Si ce résumé de la Soirée Tiko 2024 ne vous suffit pas, c’est que vous n’y étiez pas. Alors je vais vous faire une fleur (une de plus !) en entrant dans quelques détails. Un scan chronologique vous donnerait ceci :
Accueil des participants par trois bénévoles badgées ; prise de parole sur scène à 18h30 pile, animée par la pétillante Virginie Perrot. Intervention de Damien Caillard pour présenter Tikographie aux étourdis débarqués ici parce qu’ils ont vu de la lumière (et quelques nouvelles plus fraîches du média). Retrouvailles avec quatre personnes interviewées dans nos colonnes pour prendre de leurs nouvelles : Cécile Alibart qui concrétise enfin son projet, Christophe Gathier qui lance un recensement des figuiers locaux, Christine Couasnon qui discipline (un peu) ses troupes de couseuses et tricoteurs, Eric Villain qui décuple la capacité de transformation (écologique) de son entreprise de transformation (d’ail). Retrouvailles encore, avec Monsieur Changement Climatique qui a la bonne idée de fonder un média concurrent, « Antikographie ». Un petit mot de Philippe Pelade, cogérant de notre partenaire la librairie des Volcans, qui nous donne aussi des nouvelles. Photo finale. Lancement du recueil « L’année Tiko 2024 », soit 16 reportages, 5 chapitres, 104 pages, 1 préface de Jean-François Caron et beaucoup de coquelicots. Damien et moi-même qui nous armons de notre feutre « spécial dédicaces » (le stylo feutre, pas le chapeau) pour exprimer notre gratitude. Simultanément, ouverture du bar, puis du buffet (tarte aux épinards, soupe de potiron, etc.).
Ensuite, les choses deviennent plus confuses : des petits groupes se forment et se défont, discutent, trinquent, se promettent de partir bientôt mais entament une autre conversation, retournent au bar. On entend des rires, des voix enjouées, une petite musique de bonheur de se trouver là, dans toute la diversité de nos soutiens, avec des gens connus, des inconnus avec qui ont a plaisir à faire connaissance, des promesses de se revoir et des échanges de coordonnées…
Zoomons sur des moments plus précis, avec nos invités.
Des fleurs pour Cécile
Nous retrouvons Cécile Alibart que j’avais rencontrée il y a près de deux ans, alors porteuse d’un projet à l’avenir encore très incertain. Nous étions à la Saint-Valentin et je voulais mettre en avant, à travers son témoignage, la possibilité de trouver des alternatives à ces montagnes de roses cultivées et importées dans un processus très peu écologique, puis offertes de façon quasi-obligatoire à toutes les amoureuses de France, de Navarre et d’ailleurs. Cécile défendait la fleur locale, bio et de saison mais son projet patinait.
Une rupture conventionnelle, un parcours d’incubation, quelques apparitions dans les médias, les salons et marchés artisanaux plus tard, et beaucoup d’opiniâtreté, Cécile nous l’annonce pendant la soirée : elle signe le lendemain le bail de son salon de thé-fleuriste-lieu d’artisanat, d’ateliers et d’apprentissage autour du végétal. Fleur’T avec les Sens (c’est son nom) ouvrira ses portes en janvier à Montferrand : tout un univers à découvrir au 21, rue Jules-Guesde.
Cécile a aussi gagné en confiance et assume aujourd’hui plus facilement sa position d’« artiste végétale poétique et écoresponsable ». Elle nous embarque dans son rêve en forme de défi lancé à tous : « Que chacun puisse fêter la Saint-Valentin le 25 juillet, jour de la Sainte-Valentine » ; parce que c’est une période où l’on trouve des fleurs en abondance, beaucoup plus naturellement, garanties sans pesticides, ni kérosène, ni frigo énergivore… mais 100% amour et cueillette locale.
Chiche ?
“L’année tiko 2024”, 16 portraits et reportages sur des initiatives puydômoises inspirantes. Disponible à partir du 12 décembre auprès de notre association (lien ci-dessous) ou à la librairie des Volcans au prix de 19 €
Mémoire gourmande
Un conservatoire plutôt que des conservateurs : c’est ce que méritent les fruits d’Auvergne, les arbres fruitiers et les gourmands. L’Auvergne dispose comme pratiquement toutes les régions de France d’un Conservatoire d’espaces naturels. « Il s’attache à la sauvegarde et à la protection de l’environnement en travaillant sur la maîtrise foncière », nous rappelle un de ses deux vice-présidents, Christophe Gathier. Autrement dit, le CEN achète, loue ou se fait mettre à disposition des espaces sur lesquels il œuvre à la conservation ou à la restauration de la nature : forêts, prairies, lacs, zones humides, coteaux secs, sources salées… Mais aussi des vergers où, dans un projet que Christophe a développé depuis trois décennies, sont recensées, étudiées et préservées d’innombrables variétés locales anciennes d’arbres fruitiers.
En septembre 2023, il m’avait longuement raconté comment ce travail titanesque s’est déployé pour inventorier 167 variétés de pommes locales, 46 de poires, des cerisiers, amandiers, abricotiers, témoins d’un riche passé arboricole qui explique la savoureuse tradition des pâtes de fruits d’Auvergne.
Mais ce patrimoine, est venu nous expliquer Christophe, porte aussi un enjeu pour l’avenir : celui de préserver une biodiversité fruitière, de se donner toutes les chances de conserver des espèces adaptées au changement climatique et au contexte écologique, de réinjecter ces variétés locales dans l’économie, d’encourager les pépiniéristes (lesquels vendent chaque année 10 000 arbres fruitiers issus de ces cultivars auvergnats) pour contribuer à enrichir l’autonomie alimentaire de notre territoire…
« Nous avons lancé un appel à repérer les vieux figuiers dans l’agglomération clermontoise. »
Les dernières avancées du projet, ce sont de nouvelles créations et extensions de ces vergers bien particuliers. Le plus important verger-conservatoire à Tours-sur-Meymont, principalement dédié aux pommes et aux poires, s’agrandit de deux hectares. Le CEN « recherche un autre site pour les abricots parce que celui des Cézeaux est complet ».
Et un fruit jusqu’alors laissé de côté s’invite dans l’histoire. « Nous lançons un projet sur les figuiers à Romagnat et nous avons pour cela lancé un appel à repérer les vieux figuiers dans l’agglomération clermontoise », annonce Christophe Gathier. L’inventaire participatif est ouvert. Si vous connaissez des figuiers ou si leur parfum unique vous fait tourner la tête et les narines au détour d’une rue, vous pouvez y participer en inscrivant vos découvertes ici.
Organiser la spontanéité
Il y a presque un an, j’ai poussé la porte de Flax. Rue du Port à Clermont, ce lieu singulier est d’abord accueillant et ensuite (ou en même temps) dédié à la pratique de la couture. Tiers-lieu qui a contribué à redonner vie au quartier, lieu d’échange et d’apprentissage, d’inclusion pour les nouveaux arrivants, les migrants, les solitaires, les gens en reconstruction, mais aussi les passionnés de couture, les artistes du tricot, les adeptes du crochet, les inconditionnelles du DIY.
« Quand on est 170 adhérents, il faut des règles. »
A l’initiative de Flax, Christine Couasnon a su avec son noyau de bénévoles très actives, donner une âme et une chaleur à ce bel endroit où le bourdonnement des machines à coudre accompagne celui des conversations.
Tout cela s’est développé dans la spontanéité, avec des règles imprécises ou non dites, des décisions prises par celles et ceux qui sont là au moment où on en parle, de l’improvisation créative et généreuse. Mais parfois, ça coince, ça donne lieu à des frictions, des incompréhensions, des cafouillages.
Signe d’une maturité de ce collectif né en 2018, Flax a dédié l’année 2024 à mettre un peu d’ordre dans son organisation. Accompagnée par Sarah, une adhérente compétente pour le faire, l’association s’est lancée dans la rédaction d’une charte de bon fonctionnement. « Dans ma tête, je savais depuis le début qu’il nous fallait un règlement intérieur mais je ne savais pas comment le faire. Mais certains adhérents, parfois, venaient nous bousculer alors nous nous sommes lancés dans ce projet », nous a raconté Christine à la Baie des Singes. La charte agrège des « bouts de règles » qui existaient, des « choses qui paraissent évidentes ou fondatrices » telles que : ce qu’on peut faire ou ne pas faire, quels sont les espaces communs, comment exclure de façon bienveillante quelqu’un qui n’est pas à sa place, énumère-t-elle.
La conclusion semble s’imposer : « quand on est 170 adhérents, il faut des règles. » La charte dans ses habits tout neufs sera présentée aux adhérents dans une assemblée générale extraordinaire ce 20 décembre : le début d’une nouvelle ère dans la hotte du père Noël !
La suite de votre article après une petite promo (pour Tikographie)
Cette année, notre Assemblée Générale est ouverte à tous, membres ou simples visiteurs. L’occasion de mieux comprendre le fonctionnement de notre association… et de nous rejoindre si vous le souhaitez !
Rendez-vous jeudi 12 décembre à 18h à Coworkit (vers les Salins à Clermont). Inscription gratuite et détails ci-dessous
Merci pour votre temps de cerveau disponible ! Le cours de votre article peut reprendre.
Ail séché et CEC
Rochias a été fondée en 1872 à Billom. Elle transforme de l’ail principalement, mais aussi de l’oignon, de l’échalote. Et en tire divers produits déshydratés notamment, à destination des filières agro-alimentaires. On peut supposer qu’en 1872, elle travaillait l’ail de Billom.
Quand j’ai rencontré Eric Villain il y a un an à Issoire – siège de l’usine déplacée en 1997 – Rochias travaillait avec de l’ail importé de Chine et d’Inde pour moitié et le reste venait d’Espagne. Un an plus tard, « l’ail que nous transformons est produit à 80% en Auvergne », annonce-t-il.
Cette reconstitution spectaculaire d’une filière locale n’est pas la seule mesure qu’Eric et son associé Thierry Sclapari, repreneurs de la société il y a cinq ans, ont apportée, en termes d’organisation et en termes de respect de l’environnement. « Nous nous sommes jetés dans la bataille avec l’idée d’en faire un cas d’école, avec de nombreuses initiatives qui partaient dans tous les sens », décrivait-il la semaine dernière.
Pour mieux structurer leur action, la formuler et la partager en interne comme en externe, ils se sont engagés dans la Convention des entreprises pour le climat (CEC) du Massif central. C’est pour comprendre les motivations de cet engagement que j’avais rendu visite à cette entreprise. Un an après, le parcours a été accompli, une feuille de route claire a été élaborée.
« Après six mois de boulot sur les questions environnementales, on se sent moins bête. »
Et Eric Villain témoigne de ce qui a changé : « Cela m’intéresse d’aller piquer tout ce que je peux comme bonnes pratiques… et là-dessus, nous n’avons pas été déçus ! », commence-t-il. Le plan d’action est une chose, le facteur humain en est une autre. Il dit se sentir moins seul dans la démarche, avoir appris à engager le personnel qui « trouvait ses nouveaux patrons trop gentils » – et se réjouit : « nous avons organisé pour tous une fresque du climat ; je craignais qu’ils n’adhèrent pas mais ça a super bien marché ». Il a aussi travaillé l’alignement de l’engagement écologique et des impératifs économiques : « La transition a un prix, apporte peu de retours sur investissement et n’est pas encouragée. L’ail que nous vendons aujourd’hui coûte trois fois son prix d’il y a cinq ans ; il faut pouvoir l’assumer », explique-t-il.
Mais surtout, il nous livre le grand enseignement qu’il tire de l’expérience : « Nous avons beaucoup bossé… et après six mois de boulot sur les questions environnementales, on se sent moins bête. Il faut bosser pour trouver les choses très éclairantes, pour vraiment comprendre… et à partir de là, il devient plus évident d’agir. »
Édition en surchauffe
Quatre témoins, donc, pour montrer que l’action environnementale est un chemin à suivre au long cours et en progrès constant, soutenu par de belles chaînes de solidarité dans un territoire (bien) partagé.
« Les éditeurs ne savent pas produire moins. »
Nous le vérifions aussi avec la librairie des Volcans, notre partenaire qui accueille chaque mois les Rencontres Tikographie. Philippe Pelade, co-gérant de la scop, est venu nous raconter la volonté d’animer la librairie, d’en faire « un lieu vivant où il se passe des choses ». A côté des auteurs prestigieux, locaux ou à découvrir, les Volcans ont accueilli avec enthousiasme notre proposition de tables rondes mensuelles dédiées aux sujets environnementaux ; et elles ont trouvé leur public notamment depuis le cycle « Clermont sous 50°C », attirant désormais entre 50 et 80 auditeurs à chaque rendez-vous.
Pour les gérants, ce partenariat est aussi l’occasion de faire avancer un sujet qui préoccupe les libraires : « L’édition est une industrie extrêmement carbonée et nous faisons circuler par camions 3 à 5 tonnes de marchandises par jour. Il y a une surproduction qui conduit à ce que 30 à 40% des livres finissent au pilon, mais les éditeurs ne savent pas produire moins », reconnaît-il.
Le libraire annonce lui aussi des évolutions : 3 à 5 mois de travaux au premier semestre 2025 pour rendre la librairie encore plus vivante, agrandir le patio et y installer « un vrai café ».
Un temps durant lequel les rencontres seront légèrement déplacées, mais le partenariat perdurera et la librairie, bien sûr, restera ouverte.
Monsieur R., le retour…
Je serai brève dans mon dernier zoom. Nous voulons bien laisser la parole à ce personnage qui prend la fâcheuse habitude de s’incruster dans nos soirées, mais de là à commenter son intervention… je ne m’y abaisserai pas, préférant le laisser vous donner de ses nouvelles. Dois-je vraiment remercier Sébastien Saint-Martin de lui avoir ouvert la porte ?
Mieux vaut conclure en précisant que « L’année Tiko 2024 », avec sa belle couverture aux coquelicots, est désormais en vente directement auprès de Tikographie et à la librairie des Volcans. Et que ce recueil constitue un excellent cadeau de Noël. Si vous avez eu entre les mains l’édition 2023, vous retrouverez le beau format carré et la texture agréable du papier recyclé, les photos grand format et seize belles histoires qui ensemble racontent la direction à suivre pour façonner la robustesse de notre territoire et le préserver bien (et bon) vivant.
Des histoires d’eau et de rando, de paysans solidaires et de collectivités agissantes, de fleurs sur les trottoirs, de soupes locales, de cantines scolaires, de territoires mobilisés…
Enfin, enfin, enfin… après avoir encore remercié la Baie des Singes qui nous accueille gracieusement, et notamment Jenny et Sébastien qui étaient à la manœuvre, je vous propose une dernière façon de résumer la soirée : en images !
Reportage Marie-Pierre Demarty, réalisé le 5 décembre 2024. Photos Sébastien Dambrun. A la une : une joyeuse équipe pour animer la soirée Tiko 2024.
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