Le Master Plan pousse le Conseil départemental à revoir la manière d’établir des partenariats avec les collectivités du Puy-de-Dôme, de la petite commune à la Métropole.
Les principaux points à retenir
- La Fabrique départementale des Transitions est une déclinaison locale du réseau national. Il vise à accompagner les collectivités pionnières dans leur transition, dans le cadre du Master Plan.
- Plusieurs collectivités pilotes sont en cours de définition. Parmi elles, Beaumont s’est positionnée sur un projet de ceinture maraîchère, et Combrailles, Sioule et Morge sur l’énergie et l’alimentation citoyennes.
- L’engagement de ces collectivités requiert de l’exigence, comme la signature d’une charte et l’implication des élus et des DGS. Mais les bénéfices sont nombreux, en particulier la réalisation d’un diagnostic territorial et la mise en relation avec des experts d’envergure nationale.
- Autre exemple de partenariat territorial : les Côtes de Clermont représentent le principal partenariat avec le Conseil départemental. Sur les 800 hectares du site, 267 sont classés en ENS
- Le Master Plan a ici boosté l’animation foncière qui faisait défaut. Résultat : une accélération notable de la maîtrise des terrains par la ville de Clermont et la mise en place d’une stratégie de développement et de préservation.
- Avec l’aide du Conservatoire des Espaces Naturels d’Auvergne, une réflexion encore plus poussée sur les trames vertes de la Métropole est en cours, incluant les Côtes.
- Plus à l’est, c’est le Grand Clermont qui pilote le projet de Voie Verte entre Authezat et Pont-du-Château. Il s’agit de 27 km de voie dédiée aux mobilités douces, réalisée d’ici 2022.
- Le Conseil départemental a apporté une aide décisive sous forme de mise à disposition de services, principalement juridiques et techniques (routes). La compétence Voies vertes relève de la Région qui a délégué la réalisation du projet
- La Voie Verte est conçue comme un axe structurant pour la valorisation du val d’Allier. Elle permettra le “branchement” d’axes secondaires, demandés par les communes et cofinancés avec les fonds LEADER.
- Le Conseil départemental a également fait l’acquisition de quatre lacs sur le territoire, dont le Servières en 2020. Cela s’inscrit dans une logique de préservation de la biodiversité et de protection de la qualité de l’eau.
- La gestion de ces lacs se fait en lien avec les communes concernées, mais la plupart du temps elles ne sont que consultées, sauf quand certains dispositifs – notamment d’épuration – sont nécessaires en amont à la mission de protection.
- En revanche, la coopération semble être plus forte au niveau des Espaces Naturels Sensibles. Inscrits dans une “tradition” de protection environnementale du Département, ils rassemblent de vrais comités locaux de gestion et incluent davantage les collectivités et les propriétaires privés.
- Le Master Plan apporte une accélération, notamment avec la convention RAMSAR plus exigeante (initiée dans le cadre de la labellisation UNESCO) et en permettant une meilleure projection à 10 ans, dans le cadre des plans de gestion.
Accès direct aux questions
- Une déclinaison départementale de la Fabrique des Transitions
- Des collectivités pilotes sur le Puy-de-Dôme
- Un processus exigeant
- Comment le Master Plan bénéficie aux Côtes de Clermont
- Un ENS d’initiative locale
- Vers une stratégie plus ambitieuse de préservation
- La Voie verte, un axe structurant de mobilité douce
- Une épine dorsale et des arêtes
- Le soutien capital du Conseil départemental
- Une stratégie au cas par cas pour les lacs et les ENS
- Des communes plus ou moins impliquées dans la gestion des lacs
- Une accélération de la protection des ENS
Le Conseil départemental a toujours établi de nombreuses passerelles dans ses actions avec les acteurs publics du territoire : convention de financement, apport en industrie ou en compétence, accompagnement au montage de projet, ingénierie … Aujourd’hui, le Master Plan devant reprendre tous les projets portés ou soutenus par le Conseil départemental à l’aune de la transition écologique, comment les collectivités partenaires voient-elles cette redéfinition de leur partenariat ?
Une déclinaison départementale de la Fabrique des Transitions
C’est une organisation en fractale, si l’on veut : la Fabrique des Transitions, d’envergure nationale, a accompagné le Conseil départemental dans l’élaboration de son Master Plan. Bénéficiant d’un réseau important, de nombreux retours d’expérience d’acteurs locaux ayant vécu une forme de transition, et de compétences en accompagnement, la Fabrique est désormais déclinée sur le territoire du Puy-de-Dôme.
Résultat : la Fabrique départementale des Transitions, qui vient de voir le jour suite à une décision opérationnelle du Conseil départemental (le 28 mai dernier). “L’enjeu est de travailler avec les territoires [dans le département] à un niveau plus fort d’engagement”, résume Aude Van Haeringen qui dirige la mission Transition Ecologique. “On veut monter une sorte de ‘chaîne d’intervention territoriale’, du local au national, et voir comment – quand ces niveaux se coordonnent – la transition peut être favorisée”
Des collectivités pilotes sur le Puy-de-Dôme
La Fabrique départementale n’a donc que deux semaines d’existence, à l’heure où nous faisons vrombir les rotatives de Tikographie, mais les devants avaient été pris : deux collectivités locales ont officialisé leur volonté d’engagement dans ce cadre, avec la volonté d’être pilotes de ce dispositif*. Si des décisions définitives doivent encore être soumises au vote – comme au conseil municipal de Beaumont, fin juin – les pourparlers étaient suffisamment avancés pour lancer rapidement la Fabrique.
*et deux autres seraient prochainement annoncées – le but étant d’avoir au moins une collectivité pilote par grande thématique du Master Plan
A Beaumont, une ceinture maraîchère, pédagogique et sociale
Vous connaissez sans doute les nombreux terrains potagers de Beaumont, répartis autour de l’Artière. En amont, sur la zone en friche de la Ronzière – près du complexe sportif – ce sont 4 hectares qui font l’objet d’un projet de “ceinture maraîchère“, initialement destiné à alimenter en produits bio et locaux les deux écoles et le CCAS de la ville.
En 2020, la ville de Beaumont avait donc initié ce projet, avant de se tourner vers Landestini, afin d’animer des ateliers en école sur les problématiques d’eau, d’environnement, d’alimentation. Or, Landestini possède aussi la compétence de gestion et de développement de fermes urbaines. En novembre 2020, un partenariat est signé avec la ville de Beaumont pour le projet de ceinture maraîchère.
Jean-François Caron nous a poussé à voir que le projet allait bien au-delà d’une ceinture maraîchère !
Damien Pessot
Mais une autre étape a été franchie en 2021, quand le Conseil départemental s’est mis à chercher des territoires tests pour la Fabrique départementale des Transitions. Damien Pessot, adjoint au maire de Beaumont en charge de l’environnement, se souvient de sa rencontre avec Jean-François Caron : “Il était vraiment visionnaire. Il nous a dit, en substance : ‘tout le monde fait des ceintures maraîchères !” … et nous a poussé à voir que le projet allait bien au-delà.”
Le développement s’est donc poursuivi – toujours avec Landestini – sur de nouvelles bases – celles de la Fabrique départementale des Transitions – et avec des objectifs plus larges : “le ‘bien manger’ à l’école, mais aussi l’écologie, l’éducatif, le social.” résume Damien Pessot. Et l’apport opérationnel de la Fabrique ? “Nous pousser à intégrer le plus d’acteurs locaux possible dans le projet, apporter du réseau, de l’ingénierie, et fournir un diagnostic systémique du territoire … pour faire de notre ceinture maraichère un site pédagogique, sur la biodiversité ou sur les anciennes variétés par exemple”.
Le projet sera soumis au conseil municipal de Beaumont le 29 juin.
A Combrailles, Sioule et Morge, focus sur la transition énergétique et alimentaire
S’étendant de Combronde aux Ancizes – dans le nord-est des Combrailles, la communauté de communes de Combrailles, Sioule et Morge avait choisi, délibérément, de réaliser un PCAET (Plan Climat Air Energie Territorial). “On essaye d’avoir une forte dynamique sur la transition écologique dans notre communauté de communes”, résume Grégory Bonnet, maire de Montcel et vice-président de Combrailles, Sioule et Morge. “La loi ne nous obligeait pas à faire un PCAET, mais nous l’avons réalisé malgré tout.”
On essaye d’avoir une forte dynamique sur la transition écologique dans notre communauté de communes.
Grégory Bonnet
Par conséquent, des moyens humains et techniques ont été consacrés à la transition écologique dans cette zone rurale, et plusieurs projets ont été lancés autour des thématiques citoyennes de l’énergie – éolienne à Montcel, travail avec Combrailles Durables – et de l’alimentation – en s’inspirant de la politique de la ville de Loubeyrat sur des repas 100% bio et locaux pour ses écoles.
En particulier, un PAT (Projet Alimentaire Territorial) a été préfiguré dans ce cadre, avant d’être repris à l’échelle plus large du SMAD (Syndicat Mixte d’Aménagement Territorial) des Combrailles, regroupant trois communautés de communes. “C’est pertinent pour atteindre une masse critique de producteurs que nous n’aurions pas facilement eue sur Combrailles, Sioule et Morge seule. Et, comme c’est une démarche administrative assez lourde, autant la conduire à plusieurs.” selon Grégory Bonnet.
Second territoire test à conventionner avec la Fabrique départementale des Transitions, Combraille Sioule et Morge attend beaucoup du diagnostic territorial que réaliserons les équipes de la Fabrique. “[Ces experts] auront un regard plus neuf, et extérieur au territoire. J’espère que nous y gagnerons une autre vision des points à améliorer”, conclut le maire de Montcel.
Au-delà de la communauté de communes, l’intérêt de la Fabrique départementale, selon Grégory Bonnet, est surtout “d’inspirer des territoires moins en avance, qui s’engageraient dans un second temps à condition d’observer une expérience réussie proche de chez eux. C’est souvent plus facile de voir ce qui fonctionne avant de se lancer, plutôt que de partir de la feuille blanche !”
Un processus exigeant
Mais la Fabrique des Transitions, nationale ou départementale, est un réseau qualitatif : les collectivités adhérentes devront remplir certains critères, ou prendre certains engagements. Dans le cadre de sa déclinaison puydômale, plusieurs prérequis sont prévus : adhésion à la charte de la Fabrique des Transitions, portage fort des élus principaux et engagement des Directeurs Généraux des Services, et inclusion d’acteurs variés sur les territoires.
En outre, les partenaires devront s’inscrire dans un collectif de la transition au niveau du Master Plan. “Ce sera un moyen pour eux de s’engager à partager les contenus et méthodes utilisées, et à porter des cations concrètes et innovantes dans leur thématique prioritaire.” précise Aude Van Haeringen. Le Conseil départemental pourra alors les aider dans la démarche, en leur fournissant un appui méthodologique et en favorisant des mutualisations de moyens.
C’est vraiment une logique de communauté apprenante.
Aude Van Haeringen
“Nous sommes la pierre angulaire de cette démarche” poursuit Aude. “mais aussi le lien avec la Fabrique nationale des Transitions.” Comme évoqué par Damien Pessot à Beaumont ou Grégory Bonnet à Combrailles, Sioule et Morge, la Fabrique s’engage ainsi à réaliser un diagnostic territorial personnalité et systémique, avec des préconisations d’actions. Et, en aval, permettra un apport d’ingénierie, un relais vers des experts thématiques d’envergure nationale … “c’est vraiment une logique de communauté apprenante”, conclut Aude.
Comment le Master Plan bénéficie aux Côtes de Clermont
Revenons au centre du département et levons les yeux : au nord, il y a les Côtes (de Clermont). Il s’agit de l’intégralité du massif allant de Durtol/Nohanent à la Croix Neyrat/Cébazat, incluant le puy de Chanturgue et le puy de Var. Il y a de chouettes balades à y faire, et une tour télécom “couronne” l’ensemble. Au total, 800 hectares de nature plus ou moins exploitée par l’homme, et 5 communes concernées.
Un ENS d’initiative locale
Si une réflexion au niveau de Clermont Métropole est en cours, une partie du site des Côtes – 267 hectares en l’occurence – est classée Espace Naturel Sensible depuis 1988. Or, ce dispositif de protection environnemental très utilisé par le Conseil départemental est, ici, lié à une initiative de la Ville de Clermont.
Avec la transition vers le Master Plan, comment évolue cet outil ? Jérôme Cologne, chargé de mission biodiversité auprès de la Métropole (et de la Ville de Clermont) le résume ainsi : “le Département labellise les ENS, accompagne notre action de préservation et de sensibilisation, en finance certaines à hauteur de 20% … et, surtout, il donne son cadre global, pousse à élaborer une vraie stratégie“.
“Le Département donne son cadre global, pousse à élaborer une vraie stratégie.”
Jérôme Cologne
En effet, la problématique des Côtes semble surtout de nature foncière. “L’ENS donne un droit de préemption à la collectivité” précise Jérôme Cologne, “mais il est, dans la pratique, très peu utilisé. De 1988 à 2018, seuls 22% des 267 hectares protégés en ont bénéficié”. Le souci est que les Côtes rassemblent une mosaïque de parcelles, 2500 au total dont certaines se comptent en mètres carrés, pour 1700 propriétaires rien que sur la partie clermontoise !
Vers une stratégie plus ambitieuse de préservation
Jérôme Cologne milite ainsi pour une politique foncière mieux structurée et surtout mieux animée, ce qui représente du temps et des moyens. “Déjà, il faut savoir quels sont nos objectifs. Par exemple, pour faire du pâturage, il faut 1,5 hectares minimum”, de terrains contigus bien sûr.
Le cadre du Conseil départemental – qui a conventionné un plan de gestion des Côtes sur 5 ans (2018-2023) – a conduit au recensement des parties en présences et à l’identification des enjeux précis. Du côté foncier, la situation s’améliore nettement : “Depuis 2018, nous avançons sur une véritable animation foncière, afin d’avoir la maîtrise des parcelles, ou au moins l’accord des propriétaires, afin d’activer la préservation des écosystèmes”.
Grâce à un autre partenariat conclu avec le Conservatoire des Espaces Naturels d’Auvergne (CEN), et à cette animation spécifique, le taux de maîtrise directe ou indirecte est passé à 29% aujourd’hui. En aval de cette approche foncière, le CEN peut alors aider à la préservation de la biodiversité, notamment des chênaies et des pelouses thermophiles, et ce dans une optique de trame verte au niveau Métropolitain – ce sera sans doute un prochain épisode.
La Voie verte, un axe structurant de mobilité douce
Patience … bientôt, vous pourrez aller du domaine de Chadieu à Authezat, près de Vic-le-Comte, à la plage des Palisses à Pont-du-Chateau. En bicyclet-teu.
Comment ? Non, pas via l’A75, mais grâce à un itinéraire en site propre (très majoritairement), sur 27 km, dédié aux mobilités douces : la Voie Verte du Grand Clermont. Cette piste, balisée et sécurisée, suivra de près ou de loin le cours de l’Allier avec une très faible dénivelée : elle sera donc accessible à tous les usagers. Partie de la Véloroute 70 (Nevers-Palavas, tout de même), cette portion de Voie verte verra le jour d’ici 2023 – 18 km étant déjà ouverts à la circulation – et sera complétée par d’autres portions au sud et au nord qui permettront, à terme, de traverser le département.
>> Voir la carte de la Voie Verte du Grand Clermont, en meilleure définition <<
Une épine dorsale et des arêtes
Le projet est porté par le Grand Clermont, car il concerne plusieurs intercommunalités : Clermont Métropole, Mond’Arverne au sud, Billom Communauté à l’est. “Notre feuille de route stratégique est le SCOT [Schéma de Cohérence Territoriale], c’est notre projet de territoire” insiste Jérôme Prouhèze, directeur adjoint au développement du Grand Clermont et en charge de la Voie Verte. “Et, dedans, figure la valorisation du val d’Allier. Les élus souhaitaient ainsi rééquilibrer le territoire à l’est, en ‘miroir’ de l’attention portée à l’ouest via le label UNESCO.”
Au-delà du travail sur la Voie Verte proprement dit, une étude de valorisation du val d’Allier est donc commandée. Plusieurs fiches action sont élaborées dans de nombreux domaines – patrimoine, agriculture, tourisme, culture, environnement – avec, à la clé, une prise en charge importante des programmes LEADER (4 millions d’euros au total, gérés par le Grand Clermont).
Ainsi, la Voie Verte en cours de réalisation est vue comme un axe central à partir duquel différents sites pourront se greffer. “On peut par exemple financer des itinéraires doux, partant de la Voie Verte, et allant vers des sites touristiques ou patrimoniaux.” poursuit Jérôme Prouhèze, “d’autant plus que ça facilite aussi la mobilité de tous les jours ! Plusieurs communes sont d’ailleurs intéressées, et nous finançons les études, les travaux, la signalétique, etc.”
Le soutien capital du Conseil départemental
La Voie Verte est donc un exemple de projet de grande envergure, structurant pour un territoire, mais antérieur au Master Plan : elle a vu le jour durant le mandat municipal 2014-2020 (bien le projet fût plus ancien et un peu tombé dans les oubliettes). Si l’Europe et les collectivités adhérentes ont un rôle central, le projet n’aurait néanmoins pas pu se faire sans le soutien du Conseil départemental.
C’est un projet complet de développement territorial.
Jérôme Prouhèze
Jérôme Prouhèze en rappelle la genèse : “Quand nous sommes allés voir les différents financeurs, le Conseil départemental nous a proposé non pas une subvention mais une mise à disposition de leurs services, juridiques comme techniques, pour monter le projet et faire le suivi des travaux”. Et de préciser que le Grand Clermont ne dispose pas de services de ce type. “C’est donc un apport capital, en tant que maître d’oeuvre bien rodé, puisqu’ils ont une vraie compétence au niveau des routes.”
Si c’est la Région Auvergne-Rhône-Alpes qui a la compétence globale des véloroutes et des voies vertes, elle a dans ce cas délégué les projets à des collectivités locales : le Grand Clermont pour la Voie Verte éponyme, puis le Conseil départemental en direct pour les sections nord (vers Vichy) et sud (autour d’Issoire), dont les travaux devraient débuter en 2023.
“En conclusion, c’est un très beau projet pour l’Auvergne” s’enthousiasme Jérôme Prouhèze. “Toutes les collectivités locales doivent être impliquées, avec un rôle central des Conseils départementaux sur 10 à 20 ans. Mais à condition de penser aux actions de développement tout autour, à l’instar d’un axe autoroutier. C’est un projet complet de développement territorial.”
Une stratégie au cas par cas pour les lacs et les ENS
Dernier volet de notre petit tour d’horizon des partenaires territoriaux du Conseil départemental : les communes et EPCI bénéficiaires de conventions pour la gestion des Espaces Naturels Sensibles (ENS) et/ou des lacs.
Petit teaser de l’interview de Jean-Yves Gouttebel si vous ne l’avez pas lue (ou petit rappel dans le cas contraire) afin de rappeler le contexte et l’objectif de ces partenariats : “Pour [ces sites], nous passons des conventions avec les collectivités partenaires : on y apporte un concours financier aux collectivités locales de proximité, car ce sont les [mieux à même] pour gérer ces espaces. Elles se les approprient, et elles en sont fières. De cette manière, nous souhaitons aider ces collectivités à valoriser leur patrimoine.”
Des communes plus ou moins impliquées dans la gestion des lacs
Quatre lacs du Puy-de-Dôme sont aujourd’hui propriété du Conseil départemental : le lac Chambon, le lac de Servières, le lac du Guéry et le lac des Bordes dans le Cézallier. Selon Jean-Yves Gouttebel, les objectifs sont à la fois de la protection – surtout dans le cas du lac de Servières, surfréquenté l’été – et la valorisation – comme avec le parcours existant autour du Chambon, ou à venir autour du Guéry.
Comment la collaboration s’opère-t-elle entre le Conseil départemental et les communes concernées ? C’est en fait assez variable : pour le lac de Servières, racheté en 2020 à Michelin, “la commune [d’Orcival] est consultée, mais c’est le Département qui gère (…) et qui édicte les règles.”, précise Patrick Baranger, adjoint au maire d’Orcival. “Comme avec l’arrivée des gardes en 2020, l’interdiction de la baignade ou l’autorisation de la pêche”.
La commune est consultée, mais c’est le Département qui gère
Patrick Baranger, adjoint au maire d’Orcival
Cela n’empêche pas certaines conventions, parfois très spécifiques, d’être passées avec les communes. Parce que la propriété n’est pas “complète”, comme avec le lac Chambon dont la plage est propriété de la ville de Chambon-sur-Lac. Ou parce que la préservation du milieu aquatique nécessite une coopération entre acteurs. Ainsi au Chambon, où la population décuple en été, “nous avons une station d’épuration pour traiter les eaux usées, gérée par un Syndicat intercommunal Chambon-Murol-Saint-Nectaire, et dont le président est le maire de Saint-Nectaire”, explique Emmanuel Labasse, maire de Chambon-sur-Lac.
Enfin, une version simplissime existe aussi comme dans le cas du lac des Bordes : là, c’est le Parc Naturel Régional des Volcans d’Auvergne qui fait l’interface. “Les conservateurs du Parc mettent en place des mesures de protection du lac en lien avec le département, comme la mise en place d’abreuvoirs pour les animaux“ détaille Henri Valette, maire de Compains. Idem pour la zone tourbeuse de la Godivelle, voisine, protégée et mise en valeur de la même manière. “On est convié, lorsqu’il y a un problème particulier.” conclut le maire de Compains.
Une accélération de la protection des ENS
Défini par la loi du 31 décembre 1976, un Espace Naturel Sensible (ENS) est un territoire “dont le caractère naturel est menacé et rendu vulnérable, actuellement ou potentiellement, soit en raison de la pression urbaine ou du développement des activités économiques ou de loisirs, soit en raison d’un intérêt particulier eu égard à la qualité du site ou aux caractéristiques des espèces végétales ou animales qui s’y trouvent“. En plus d’une logique de protection – voire de préservation – les ENS ont peu à peu bénéficié d’une logique de valorisation et de sensibilisation via des parcours aménagés ou des visites organisées et commentées.
Si la compétence des ENS revient au Département, qui a développé un site dédié à ce sujet dans le Puy-de-Dôme, la création d’un ENS et sa gestion sont plus disparates. Sur le Puy-de-Dôme, 9 ENS sont gérés directement par le Conseil départemental, et 14 autres ENS sont dits d’initiative locale, donc portés par des communes ou des communautés de communes.
“Il y a une historicité de la volonté du Département en matière de protection [de la nature]” précise Marie-Josée Breton, chargée de mission ENS au Conseil départemental. “Des politiques [en la matière] existaient déjà, sur l’eau et la qualité des rivières notamment.” La gestion des ENS, directe ou indirecte, se rapproche donc beaucoup de la politique de l’eau – dont l’acquisition de lacs, évoquée plus haut.
Il y a une historicité de la volonté du Département en matière de protection de la nature.
Marie-Josée Breton
Quand les ENS sont gérés par les collectivités locales, comme dans le cas de la Vallée des Saints (gérée par la Communauté de communes du pays d’Issoire), un comité local de gestion se met en place. Il regroupe la structure gestionnaire et le Département, ainsi que des représentants des propriétaires fonciers. Car, bien souvent, la propriété des sites reste très éclatée (souvent plus de la moitié revenant à des particuliers). Le Conservatoire des Espaces Naturels est également associé aux démarches.
Quel est, dans ce cadre, l’apport du Master Plan ? “Le cadre d’initiative locale est porté par le Département. C’est à la communauté de communes de répondre à cette méthodologie” selon Alexandre Duboc, responsable de la Vallée des Saints auprès du Pays d’Issoire. “Cela se fait dans le cadre d’une convention de partenariat, financier et technique, signée pour 10 ans depuis 2018″ et qui apporte 20% du coût de fonctionnement par le Département (soit 40 000 €).
Le Master Plan donne ici un coup d’accélérateur à la politique de protection des ENS. “Il y a les zones humides ‘simples’, bénéficiant du plan départemental, et le projet RAMSAR – un label de protection des zones humides remarquables, dans le cadre de l’UNESCO” indique Marie-Josée Breton. “C’est un gros projet pour le Département ! Il faut bien prendre en compte les éléments du paysage, les ressources à protéger … cela porte beaucoup de solutions pour la biodiversité.” Avec, en ligne de mire, des plans de gestion prospective à 10 ans inscrits dans la politique de transition écologique du Département.
Synthèse d’entretiens réalisés par Damien Caillard et Bastien en juin 2021 ; crédit photo de Une : Danyel Massacrier, ville de Clermont-Ferrand (DR)